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                        LETTRES INÉDITES                       285

toutes les marchandises seroient demandées au même prix.
Il est sûr que si la progression va toujours dans la même pro-
portion, il sera absolument impossible aux rentiers d'y tenir,
et ils seront forcés d'abandonner leurs revenus à la nation,
pour qu'elle les nourrisse. Convenez que cette perspective est
assez alarmante.
   Il est bien étonnant qu'un homme qui a joui d'une aussi
grande réputation que M. Linguef, soit tombé dans une telle
obscurité, qu'on ne puisse savoir s'il existe ou non. Je le crois
encore en vie, à moins qu'il ne soit mort en Angleterre, à
moins qu'il n'existe ailleurs. Cela n'esl-il pas bien trouvé?
Pour moi, j'avoue que j'en suis encore à connaître l'opinion
de cet homme célèbre. Il me semble même que celte opi-
nion n'a jamais été prononcée d'une manière bien marquée,
dans les numéros de son journal qui ont paru en 1789 et en
1790; il me semble qu'il se moquoil alternativement des
deux partis. Depuis ce temps, je ne l'ai pas lu et je ne sais
auquel il s'est attaché ; mais je le connois personnellement
assez pour être sûr qu'il a été révolté de toutes les horreurs de
notre révolution , et qu'il aura pris le parti de se tenir de
côté. Il est sûr au moins que, s'il avoit voulu y jouer un rôle
actif, dans le sens des patriotes, rien ne lui eût été plus facile.
On n'auroit rien négligé pour s'assurer d'un homme du
mérite, des talents et de la célébrité de M. Linguet, qui pou-
voit être d'un grand poids dans la balance. Or, comme il n'a
joué aucun rôle politique, que nous ne l'avons vu dans aucune
assemblée, dans aucune place, j'en infère qu'il pense modé-
rément , telle opinion qu'il ait embrassée. Ce qui m'étonne
le plus dans tout ceci, c'est son sileuce ; car il n'est pas homme
à se taire. Peut-être conlinue-t-il son journal là où il habile,
eta-t-il subi la prohibition attachée à tous ceux qui ne pen-
sent pas comme le parti dominant. M. de Fontanes doit en
savoir quelque chose, et vous me ferez plaisir de le lui de-