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248                             LITTÉRATURE.
augmentent ou diminuent le mérite ou le démérite d'une action. Ecartant
lous les principes empiriques, c'est sur l'idée d'un bien absolu révélé par
la raison à tous les hommes qu'il a fait reposer la Morale tout entière. Il a
insisté sur l'universalité et le caractère absolu de cette idée ou de cette loi
morale naturelle dont on retrouve les traces uniformes et profondes dans
les individus et les peuples de tous les temps et de tous les lieux. ïl a cher-
 ché à éclaircir cette idée du bien absolu en la ramenant à l'idée d'ordre
et de fin universelle. La raison nous oblige de croire que tout est réglé dans
le monde, que chaque phénomène a sa loi, comme sa cause et sa substance ;
c'est-à-dire la raison nous force à croire qu'il y a un ordre absolu des choses,
lequel est le bien universel et absolu. Mais s'il y a un ordre absolu, chaque
 chose a une fin qui est son rapport à cet ordre absolu. L'homme aussi a
donc une fin dont il a la charge et la responsabilité, étant intelligent et
libre, et une fin sacrée, puisqu'elle est un élément de l'ordre absolu. Cette
 fin est son bien, car la fin se réciproque avec le bien, comme disait la
 scholastique. Or en raison de la corrélation entre la nature et la fin d'un
être, la fin de l'homme se déduit de sa nature. L'homme ne se connaît que
comme une cause ayant l'initiative de ses actes, comme une force aspirant
 à prendre conscience et possession d'elle-même. De là M. Bouillier a con-
 clu que la fin de l'homme en ce monde est la formation et le développe-
ment de sa personnalité. Il s'est plu à montrer quelle lumière jette cette
conception de la fin de l'homme sur les conditions de la vie ici bas. Tel
étant ce but, tout s'explique dans la vie et la Providence est justifiée ; car
que sont la douleur, l'obstacle, toutes les choses dont nous nous plaignons,
 sinon autant d'aiguillons qui nous poussent à nous élever de l'humble état
de chose à la sublime condition de personne, c'est-à-dire à l'accomplisse-
 ment de notre destinée. De ce principe fécond, dérivent tous les devoirs
 de l'homme envers sa sensibilité, son intelligence et sa liberté. M. Bouillier
 a réfuté également les Stoïciens qui prêchaient la destruction de tous les
 sentiments sans distinction, et les Epicuriens utopistes de l'école de Saint-
 Simon et de Fourier qui préconisent l'émancipation absolue des passions,
 l'abrutissement de l'individu, réalité vivante, au profit d'une chimérique
 abstraction sociale. Ses devoirs envers la vérité, les rapports de la Logique
 avec la Morale, le caractère sacré, l'inaliénabililé de la liberté n'ont pas été
 déduits avec moins de force et de lucidité. Le corps, instrument de la per-
 sonne morale participe de son inviolabilité, et la question du suicide a
 rempli plusieurs leçons d'une haute importance. Les devoirs envers la
 nature physique, envers les animaux découlent de la même source. Entre
 la douceur à l'égard de l'animal et la douceur à l'égard de l'homme, il y