page suivante »
UN DÉJEUNER. 229 vous nous avez quittés pour la dernière fois. L'année suivante vous avez été fait prisonnier. Vous avez passé deux ans dans les prisons de Moscou, et six ans en Sibérie ; vous avez mis six mois pour revenir ; cela fait que j'ai seize ans et demi, bientôt dix-sept. On change pendant ce temps-la. Frédéric déjeunant. C'est juste. Et toi, m'as-tu reconnu ? Lisbeth. Oh ! tout de suite, grand père. C'est-à -dire, je vous croyais un peu plus grand, et vous n'avez pas tout à fait la figure que je m'imaginais. Je vous voyais dans ma pensée. C'était bien à peu près cela, mais cependant c'était autrement. C'est égal; c'est bien vous, et pourvu que vous aimiez toujours votre petite fille, elle sera bien contente, quoique vous ne la fassiez plus sauter comme autrefois sur vos genoux. Frédéric. Le fait est que tu serais un peu grande. Mais j'y pense ; a ton âge, n'aurais-tu pas un peu envie de te marier? Lisbeth. C'est bien pour cela que je vous ai écrit, grand père. Frédéric. A cause de ton mariage? Lisbeth. Oui, grand père. Frédéric. Avec qui? Lisbeth. Toujours avec Hermann... C'est mon père... Frédéric. Ah ! oui, ton père veut te le faire épouser et toi tu ne veux pas. Lisbeth. Mais c'est tout le contraire. Je ne demande pas mieux que