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192 NOTICE SUR L'IMPRIMERIE DE TRÉVOUX.
de toutes parts, et le Prince, trop faible souverain en Dombes,
n'osait invoquer le droit de représailles. Il fallut bientôt chercher
d'autres ressources.
De tout temps l'industrie principale de la Hollande fut de
contrefaire les meilleurs livres imprimés en France ; leur débit
à l'étranger et leur introduction frauduleuse dans le royaume
causaient un préjudice à la librairie. Par contre, soit clandestine-
ment , soit par privilège tacite, on réimprimait leurs bons ou-
vrages à Paris, à Lyon, à Rouen, etc.; la police fermait les yeux,
et la vente en était tolérée.
La Compagnie des libraires de Trévoux, surtout depuis 1708,
se mit à exploiter sur la plus vaste échelle presque exclusivement
ce genre de contrefaçon. La beauté du papier et du caractère, et
la netteté de l'exécution typographique firent presque toujours
préférer la contrefaçon à l'édition originale, et la compagnie se
vit souvent dans la nécessité de réimprimer le même ouvrage
plusieurs fois dans la même année, ou pendant plusieurs années
consécutives. Les libraires de la Haye et d'Amsterdam se plai-
gnaient du préjudice au duc du Maine (1), qui apostillait ainsi leur
requête : « Renvoyée à Monsieur de Torpanne ; je ne connais nul-
« lement cet homme ; je ne sais pas ce qu'il veut dire. » Le chan-
celier chargeait alors un des sociétaires de leur répondre, qui
s'en acquittait par de justes et virulents reproches. Les Hollan-
dais décriaient alors les éditions dans leurs journaux littéraires.
Mais le public était juge.
Un œil exercé reconnaît facilement les éditions de Trévoux,
surtout celles postérieures à 1732, au caractère qui sortait de la
fonderie établie en Dombes, en 1731, par Christophe Moucherel.
La plupart des in-12 édités sous une des fausses rubriques de
Hollande ou d'Allemagne portent dans le titre une sphère sur
bois, beaucoup plus grossièrement faite et bien différente de
celles employées par les libraires de ces deux pays. Ne pouvant
assez exactement la décrire, nous en donnons à la fin de notre
article un dessin fidèle. C'est une marque certaine pour reconnaî-
tre les produits des presses trévoltiennes.
(r) Archives de l'Empire, carton E, nQ 2788.