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                           PÉLOHONÈSE.                            4G9
statues et de temples dignes de la magnificence et des richesses
des Coryuthiens. Un âge d'austérité et de foi succéda à cet âge d'or,
et d'humbles chapelles chrétiennes s'élevèrent sur les débris
somptueux des temples ; puis un âge de fer survint et ajouta de
nouvelles ruines aux anciennes ; des châteaux forts, des caser-
nes, des murs crénelés usurpèrent le trône de la divinité. Le der-
nier âge vit aussi sa fin ; les soldats disparurent de la citadelle
comme les dieux avaient disparu des temples, sur tout cela , ré-
gnent le silence, la solitude et l'abandon, jusqu'à ce qu'une puis-
sance nouvelle s'installe plus forte et plus durable sur toutes ces
ruines amoncelées.
    La citadelle de Coryuthe était un chef-d'œuvre de fortification ;
la muraille qui l'entoure a pour base d'inaccessibles rochers -, elle
monte et descend pittoresquemeut suivant les courbes du terrain ;
ses créneaux sont presque partout intacts et se suivent rangés
les uns à côté des autres, droits et immobiles comme des soldats
au moment du combat; en quelques endroits seulement une
file entière a été enlevée par les boulets ennemis et les ruines
rougeàtres de la pierre brisée ressemblent à du sang qui coule.
D'énormes canons montrent leurs gueules béantes aux embra-
sures. L'airain dont ils sonts faits est chauffé par le soleil, et l'on
croirait, en les touchant, que'la poudre fermente en eux et qu'ils
sont impatients de vomir de nouveau la flamme et la mitraille.
 Mais, le soir venu, cette sourde colère s'éteint d'elle-même ; ils
redeviennent froids ; tout est calme autour d'eux, aucune armée
ne se présente à l'horizon; le seul ennemi qu'ils aient à redouter
et contre lequel ils ne peuvent rien, c'est la rouille qui les ronge.
    Du sommet de l'Acropole, le regard embrasse un sublime pa-
norama. Au dessous de vous, deux mers se laissent voir ensem-
ble, celle de Lépante et celle deSalamine: celle-ci, calme, bleue,
avec des reflets de montagnes dans ses flots et sur ses rives , des
anses mystérieuses où se réfugient des barques qui glissent sous
leur voile latine, rapides, gracieuses et blanches comme des
cygnes. Le combat de Salamiue a cessé sou bruit ; rien ne trou-
 ble plus la tranquillité profonde au sein de laquelle l'ombre de
 Thémistocle se repose de ses victoires. L'autre mer est verte.