Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                           PÉLOPONÈSE.                          4,>
                                                                 G"
plissaient le creux du vallon et mêlaient leur voix plaintive aux
voix plus mâles et plus grandes des autres forêts. Quelques-unes
des premières prêtresses de Bacchus, chassées d'Argos , vinrent
confier aux échos discrets de ces lieux les mystères de leur culte
et se livrer à leur étrange délire au sein de l'impénétrable asile de
ces bois. Au premier plan du paysage se trouve le mont Apésas ,
taillé en forme d'autel et sur lequel Persée offrit pour la première
fois un gigantesque sacrifice à Jupiter Âpesantius. À quelque
distance de là, je pénétrai dans la caverne du lion de Némée, re-
doutable souverain de cette nature primitive. Au pied du mont
Apésas, se trouvait le temple de Jupiter Néméen ; trois de ses
colonnes existent encore, sveltes, élancées, revêtues par le soleil
 d'une couche d'or, et coiffées d'un lierre sombre qui s'entrelace
 aux ornements brisés de leurs chapiteaux. De nombreux frag-
 ments de marbre gisent à leur pied. Ces trois colonnes produi-
 sent un effet sublime au milieu de ce désert bridant et de ces
 montagnes aujourd'hui monotones et dénudées. Je les revis une
 autre fois la nuit; ainsi rapprochées les unes des autres , éclairées
 par la lune, se dressant comme de blancs fantômes dans l'ombre
 environnante, elles formaient un groupe saisissant de grâce et
 de mélancolie ; elles semblaient se mouvoir aux lueurs indécises
 de la nuit et l'on eût dit trois nymphes, surprises et troublées de
 ne plus retrouver comme autrefois le chemin qui les conduisait
 dans les grandes forêts et les vallées ombreuses chantées par Pin-
 dare. Sur le chemin qui conduit hors de la vallée, on voit encore
 la source où la nourrice d'Opheltes conduisit les sept chefs de Thè-
 bes pressés par la soif. C'est aujourd'hui une petite fontaine
 turque à laquelle nous nous désaltérâmes nous et nos chevaux.
    Au sortir de Némée, ce sont des vallées bizarrement coordon-
  nées entr'elles, des plateaux accidentés couverts de blocs de
  granit qui semblent transportés là par la main des hommes.
  Souvent, le chemin, au lieu de tourner autour des rochers qui le
  barrent, passe au travers et vous force à suivre la voie dange-
  reuse tracée par les torrents. Au détour d'un de ces rochers ,
  nous nous trouvâmes face à face avec une sixaine d'hommes ar-
  més et de mauvaise mine. « Des. Clephtes », me dit tout bas mon
                                                        30