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NOTICE SUK SA1NT-ISAMBERT-DE-JOUX. 449 où l'on a pu plaquer un autel boiteux. D'ignobles œils-de-bœuf élevés au niveau du plafond donnent du jour dans le vaisseau ; une immense et laide charpente placée au-dessus de la grande porte d'entrée rappelle les soupentes qui étouffent les maisons d'ouvriers. Cette église dans une église est réservée aux Péni- tents. Nous n'avons jamais compris pourquoi l'on permettait à une fraction des habitants d'une paroisse de s'isoler, pendant la prière, du reste de la population. Nous comprenons encore moins pourquoi l'on tolère le ridicule vêtement dont ils s'affu- blent et qu'ils viennent étaler dans les rues à chaque cérémonie religieuse. Cette mascarade dévote eut, dit-on, son mérite au moyen âge, lorsque nos rois, qui ne trouvaient pas le temps de travailler au bonheur de leurs sujets, avaient pourtant celui de se faire fouetter pour leurs péchés. Qui ne voit pas qu'aujourd'hui, en France, ces pratiques d'un autre temps n'excitent que le rire et le dégoût ! Croit-on qu'il soit plus facile de faire son salut lors- qu'on a jeté sur sa tête une serviette blanche, et que Dieu ré- pandra plus volontiers ses grâces sur le sac du pénitent que sur la bure du cultivateur ! C'est, du reste, un des caractères de notre époque vaniteuse que de vouloir agir différemment des autres, au lieu de cher- cher à mieux faire. Rester à sa place, travailler et prier dans la foule, c'est un supplice que chacun veut éviter. Ce que nos aïeux faisaient dans la vivacité peu réfléchie de leur foi, nous le faisons un peu par habitude et beaucoup par orgueil, et nous attachons à leurs pratiques vieillies et déplacées la ténacité de notre amour-propre et les marques de notre mauvais goût. De là tous ces ornements faux et absurdes dont nous défigurons nos temples. De là ce clinquant, ces fleurs artificielles, cet oripeau qui encombrent nos autels, bien plus , les autels de l'église de Brou, ce bijou de marbre, la merveille du pays. Il est vrai que dans un coin, dans les quatre coins de nos sanctuaires, les fidè- les rencontrent par compensation de vieilles charpentes, des au- 29