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208           ÉLOG1Î DE LOUIS-GABRIEL SUCHET.

 pagnons d'armes. Si quelquefois il lui arriva de parler de lui
 à l'Empereur, il ne lui rendit qu'un compte modeste de ses
actions, îa renommée en publia la gloire. Son ambition
élail satisfaite , dès qu'il se trouvait en état d'agir et de
servir son pays. Aucun général n'inspira plus â ses soldais
cet amour pur et désintéressé de la patrie qui apprend ù
supporter les privations et les souffrances.
    La vie du maréchal nous offre d'autres exemples non
moins remarquables de bonté et de grandeur. Au milieu de
tous les désordres des camps et de lous les excès inséparables
de la guerre civile , lors de nos grandes crises politiques ,
l'humanité se réfugia sous sa lente , et n'en fut jamais re-
poussée. Cette vie est semée de traits qui , sous le point de
vue de la noblesse , de la religion et de l'humanité , lui
font peut-être encore plus d'honneur que ses grands talents
militaires. Nous en ferons connaître seulement quelques
uns.
   Le duc d'Albuféra , investi, en 1815 , du commandement
de l'armée des Alpes, dont le quartier-général se trouvait à
Lyon , était à dîner avec son état-major ; un aide-de-camp
vint lui apprendre que Grouchy avait en son pouvoir le duc
d'Angoulême. Quelques officiers qui étaient là , croyant faire
leur cour au maréchal , se mirent à s'égayer aux dépens de
ce prince , et à plaisanter sur sa dévotion. Suchel , qui était
vif sur l'honneur, indigné de ces propos, se lève tout à coup
et leur ordonne de cesser de telles insultes au malheur. Les
officiers se lurent un instant. Ils reprirent bientôt la conver-
sation et témoignèrent la joie qu'ils auraient de voir passer
re prince prisonnier à Lyon. — « Vous ne le verrez pas,
« Messieurs, répliqua avec chaleur le maréchal ; il a capi-
« lulé. Si l'Empereur refuse de ratifier la capitulation , je
« quitte le service. Pour Dieu ! Messieurs , sauvons l'hon-
« neur, c'est tout ce qui nous reste. Dans tous les cas , je