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PÉLOPONÈSE. 63 grand figuier pend à l'une de ces crevasses, comme le cadavre d'un guerrier tué dans le combat et retenu par les pieds contre la muraille qu'il défendait. A l'autre extrémité, il est aisé de recon- naître le théâtre à sa forme ovale et allongée ; les gradins sont détruits , et les pierres ont disparu ; c'est par là que je pénétrai dans la citadelle. De cette petite éminence, on embrasse d'un coup-d'œil toute l'étendue que Sparte occupait autrefois. Si l'on oublie un ins- tant les données, incertaines d'ailleurs, de l'histoire, un irrésis- tible attrait vous porte à réédifier ses quartiers , ses rues, ses places et ses temples suivant la fantaisie de l'imagination : là , se trouvait le grand temple de Jupiter, plus loin celui d'Esculape et celui qui renfermait la statue voilée de Vénus, surnommée Mor- phô ; et puis les temples de César et d'Auguste, hommes déifiés dont on rencontre partout les autels à côté de ceux des grands maîtres de l'Olympe. Près du théâtre, était située la place publi- que, où l'on entrait par la porte des Perses, construite en entier de leurs dépouilles ; non loin de là , le Scias, où le peuple s'as- semblait et décrétait ses formidables guerres. Derrière la colline, un ruisseau coulait et se séparait en deux bras qui se rejoi- gnaient plus bas ; sur la petite île ainsi formée se trouvait le Pla- taniste, fameux quartier où la jeunesse de Sparte, partagée en deux camps, s'exerçait aux combats. «Là , raconte Pausanias, on se livre à coups de poing et à coups de pied une lutte achar- née; on cherche à s'entr'arracher les yeux, on se mord , on se presse corps à corps; une troupe tombe sur l'autre et s'ef- force de pousser dans l'eau son adversaire.'» La jeunesse athé- nienne aurait rougi sans doute de se livrer à une lutte si brutale; elle exigeait l'élégance jusque dans le pugilat ; le vainqueur de- vait frapper avec art, et le vaincu, tomber avec grâce. 11 me sem- ble, au récit de Pausanias, assister à une mêlée d'hommes du peu- ple ivres, s'entre-déchirant au coin de quelque carrefour de nos grandes villes. Cette brutalité sauvage et cette énergie féroce étaient dans le caractère des Lacédémoniens et dans l'esprit de leur législation. Un feu de berger achevait de se consumer à quelques pas de