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122 LA REVUE LYONNAISE
— « Un miracle! ai-je dit; c'en est un, sans conteste;
Chrétiens, adorons vite, adorons à genoux
Notre Dieu, si souvent manifesté pour tous,
Notre Dieu que n'arrêtent pas,
Vivant, les bourreaux juifs, ni les lâches judas,
Mort, les blasphémateurs, ni la puante peste
Des hypocrites, des cœurs bas.
Donc, sitôt mon lever, paupière bien ouverte,
Je regardais le Tibre où, dans l'eau jaune et verte,
— Tel qu'un beau, noble et fier jeune homme, — rutilant,
Rayonnait Phébus insolent,
— L'Olympien qui, seul, a cette vertu rare
De donner la santé, qui, sans en être avare,
Répand tout ce qu'on trouve ici-bas d'excellent ; —
Sur l'accapareuse rivière
Tout à coup je vois un objet
Qui flotte, et je ne tarde guère
A vouloir savoir ce qu'il est.
— « Va, ma Lydie, au bord de l'onde
« Chercher là , ce qui flotte et qui semble appeler
« La main,pour le saisir, l'oeil pour le contempler. »
Lydie y court; grâce à l'eau peu profonde,
Elle arrive jusqu'à J'objet mystérieux,
Son doigt le saisit, curieux.
Mais, las! elle m'apporte... une pauvre cassette
En bois que nul ciseau n'a pris soin de fouiller,
Nue et sans ornements... Sur l'aspect je regrette
De n'avoir pas laissé, sans plus m'en soucier,
Le flot qui roule tout ce que le bord lui jette,
Emporter à la mer un objet si grossier.
Pourtant, d'un œil perçant, je scrutais ma trouvaille.
— Que risqué-je à l'ouvrir? — la chose më sourit;
De mes doigts frémissants je cherche, je travaille
Crac, bientôt la boîte s'ouvrit.
Soudain, — resplendissante flamme ! —
De soleil en sort un rayon
Qui m'aveugle et me semble entrer à fond dans l'âme,
Comme si du Seigneur d'amour et de pardon,
Notre Dieu, né dans une étable
Pour sauver jusqu'au plus coupable,
C'était une apparition. »
La foule au mot sauveur se prosterne, éperdue.
Gueux, richards, serfs de la charrue,
N'ont qu'un désir, qu'un souci, qu'un tourment :
Baiser d'une bouche pieuse