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750                       LA R E V U E L Y O N N A I S E

l'Orient, où abordent des voyageurs qui n'ont pas toujours pour but une recherche
du domaine de l'art ou de l'histoire. Il y a déjà longtemps que l'Egypte n'est
plus complètement « cette terre de la science et de la solitude », la Syrie devient
aussi et de plus en plus, le lieu de rencontre des archéologues et des érudits ;
mais la Palestine voit affluer sur son sol avec les pèlerins de la science et de
l'art, les pèlerins de la foi. Ceux-ci ne sont pas toujours les plus indifférents en
matière de recherche et d'érudition. N'est-ce pas à Bethléem, l'ancienne Ephratah,
dans le plus ancien des édifices sacrés qui a traversé, presque intact, les vicissi-
tudes des temps, que lettrés, archéologues, artistes se sont donné rendez-vous à
différents âges et nous l'ont fait connaître mieux que pas un des plus beaux
monuments de l'occident ? Pour le plus simple visiteur, que de souvenirs s'y
pressent !
   Une fois qu'on a mis le pied sur le sol de la Judée, en ne s'en éloigne pas à
volonté ; il faut s'arracher à la puissance d'attraction de cette terre mystérieuse.
Le désert n'y est-il pas aussi riche en souvenirs que fertile en aspects étranges ou
splendides ? Quoi qu'on ait pu dire de l'Arabe, ce n'est pas l'un des moindres
attraits d'y cheminer avec lui. Chef de~tribu ou simple pasteur, souvent il impose
par son attitude ; ses réponses brèves et sentencieuses ont la fierté et l'énergie
sauvage de l'homme du désert ; tous se proclament avec orgueil les descendants
d'Abraham. A eux, habitants des villes de Judée, ou nomades dans les plaines,
on pourrait redire sans ironie le trait final de cette allocution d'un prêtre de
Saïs à Solon : « 0 Athéniens, vous n'êtes que des enfants, vous ne connaissez rien
de ce qui est plus ancien que vous. Remplis de votre propre excellence et de celle
de votre nation, vous ignorez tout ce qui vous a précédés, vous croyez que ce
n'est qu'avec vous et avec votre ville que le monde a commencé d'exister ! »
   Plus heureux que les Athéniens, les fils d'isaac ou d'Ismaél ont une connais-
sance plus claire et plus exacte de l'origine et de l'histoire de leur race ; un
livre leur est un bagage inutile, mais ils connaissent toutes les vicissitudes, les
gloires de leurs ancêtres. Les Patriarches sont leurs proches ; ils ont tous un
même sang, la fierté des mêmes souvenirs.
   Ce long voyage en Palestine, où l'on est en contact avec l'Arabe, nous l'avons
fait en lisant un ouvrage dont le premier volume s'attarde surtout à décrire
Bethléem et sa basilique. Quand, après avoir longtemps erré, un botaniste a enfin
découvert une fleur cherchée, il la prend avec soin, l'approche de son regard,
l'examine en tous sens, et, de sa racine au sommet, la considère avec amour.
Pour Fauteur de notre livre, Bethléem a été cet objet tant désiré , on sent qu'en
le visitant, il était tout imprégné de cette pensée qu'il a prise pour épigraphe de
son premier volume. « Un botaniste a consacré un livre à décrire une fleur et
raconter sa vie, Bethléem est pour moi cette fleur ».
   Il est de ceux auxquels la fortune propice a permis d'errer à travers le monde,
et des plus autorisés à justifier la prédilection des esprits délicats pour la
Palestine : « L'homme, écrit-il dans une de ses préfaces, l'homme tourmenté
d'un ardent désir de voir, de connaître, d'apprendre, doit visiter la biblique et
évangelique Palestine, la mystérieuse Egypte, la gracieuse Grèce, l'artistique
Italie. De ces quatre régions privilégiées, la première est encore la plus attirante
par les grands événements dont elle a été le Ihéàtre et par l'immense influence
qu'ils ont eue sur l'humanité. Les monuments de la Grèce, de l'Egypte et de l'Italie
parlent aux sens et à l'imagination; ceux de la Judée parlent à l'âme, au c œ u r .