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                                        FRLIBRIGE                                             221
 e.... de phylloxéra dins li vignarès ; ai vist per escaçenco li poulido ehatouno
de Seloun, tant galantouno, càspi ! qu'après elo an rout lou mole (n'en parlen
 pas se voulès) ; e subretout ai vist de soulèu (es nimai eici nimai deforo : ei just
 per acô d'aqui que quateoant me pode ensouveni de la lengo e de l'assert (tambèn,
per aqueste, cresejamai l'avé perdu).
    Sieu dounc urous vous dire a toute bonjour e benestre, e de vous faire moun
gramaci per lou plési de m'asséta cado senmiauo entre mitan de toutis aqueli
lèri e valent felibre. Li Franchiman disoun que ses de galant sounjo festo qu'uno
souleiado a'mbria : que Dious en fague per iou, es tout ço que ie demandé !
pamèns, se sabe pas canta coumo vautre, pourrai vous ausi quand parlarès de
noste pa'is : sen parlo gaire dins aquèu Paris mounte eresoun que l'aiùli es uno
fougasso e la cigalo uno langousto, que l'oulivo eanto dius li falabreguié e que
Iou soulèu se met a la sauço emè li canar.
   E piei, apoundrai tambèn, meten que fuguesse un franchiman de Paris, un
d'aqueli coume ne soun (de tout peu ia miehanto bèsti) un d'aqueli esoumerga
besuquet e traite coume l'aïgo que dor — boutas ! sarié per ièu pamens causo
de requisto, noum d'un garri ! de veire tant de cansounejaire, tant d'amistous
cambarado coume s'en trovo dins noste pa'is mounte bessai erbo verinouso po
pas veni.
   Aro, laissas me, saluda d'uno paraulo la mémento d'un brave ome de moun
endré, lou paure Peyrotte, que fugue felibre e faïenciè. Estudiè belèu pas au
coullége e crésè que vous lou pode afourti, — mai lalejè verai coume un rous-
signou ; coume uno abiho zounzounavo a la perdudo ; soulé enie sis ami, espan-
tavo l'ausido dis paisan que partien en cor i refrin ; fugue segur un di proumiè
que parleron en nosto lengo e que senso caufa lou Franchiman a noste soulèu
trouberon toustèms si cansoun e si coublet dins l'amour de soun pais.
                                                                .1 ULBS B o i S s i E R È .


lesjolies filles de Salon, si charmantes, parbleu! qu'après elle on a rompu le moule (n'en parlons
pas, voulez-vous)? Et surtout j'ai vu du soleil (il n'est ni ici, ni au dehors): c'est justement
pour cela que j'ai pu aussitôt me souvenir de la langue et de l'accent (aussi bien, pour celui-
ci, je crois ne l'avoir jamais perdu).
   Je suis donc heureux de vous dire bonjour fit bonne santé, et de vous apporter mes remer-
ciements pour le plaisir de m'asseoir chaque semaine parmi tous ces beaux et vaillants félibres.
Les Français disent quevous êtes de galants songe-creux qu'un coup desoleil enivra; que Dieu en
fasse autant pour moi, c'est tout ce que je lui demande. Je sais que vous parlez souvent d
notre pays ; on n'en parle guère dans ce Paris où on croit que l'aïoli est une fougace et la
cigale une sauterelle, que l'olive chante dans les micocouliers et que le soleil se met a la sauce
avec les canards. Et puis, ajouterai-je aussi, même si j'étais un Français de Paris, un de ceux-
là, comme il y en a (de tout poil il y a méchante bête), de ces excommuniés- dédaigneux et
traîtres comme l'eau qui dort, — allez, ce serait pour cependant moi cause de joie, nom d'un
rat! de voir tant de chanteurs, tant de poètes, tant de bons camarades comme on en trouve
dans notre pays où peut-être herbe vénéneuse ne peut pas venir.
   Maintenant laissez moi, avant de me taire, saluer d'un mot le souvenir d'un brave homme
de mon endroit, le pauvre Peyrotte, qui fut poète et potier. 11 n'étudia peut-être pas au
collège, et ja crois que je puis vous l'assurer, mais il gazouilla vraiment comme un rossignol ;
seul avec ses amis, il charmait l'oreille des paysans qui partaient en chœur au refrain, il fut
sûrement un des premiers qui parlèrent notre langue et qui, sans chauffer le français à notre
soleil, trouvèrent toujours leurs chansons et leurs couplets dans l'amour de leur pays.
                                                                   JULES     BOISSIÈRE.