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                     B A L A Z U C ET P O N S DE RALAZU|C                           175

  parents « opprimés » pour les circoncire. Mais, c'est rare,
  l'attendrissement n'est pas dans sa nature.
     Raymond est certainement un lettré, mais un lettré sans pré-
  tentions. Il déteste « Arnulphe » qui s'enorgueillit de sa qualité de
  littérateur : quia litteratus erat. 11 faut ajouter qu'il le déteste
• surtout parce qu'il est mauvais prêtre « peu continent » et Raymond
  est surtout chaste. Il possède ses classiques ; telle de ses phrases
  rappelle Quinte-Gurce, avec lequel il a certaines ressemblances.
  Mais il connaît davantage, — et cela se comprend, — les auteurs
  sacrées, les hagiographes. Les évangiles et les psaumes lui sont fa-
 miliers, et telle de ses invocations : « Lève-toi, Seigneur, et aide-
  nous à cause de ton nom... Et il s'est levé le seigneur... », est une
 réminiscence évidente des chants lyriques du Roi-Prophète. Son
 style est simple, presque familier ; il faut cependant faire une
 exception pour les dix premières pages du livre, dans lesquelles
 le chroniqueur s'élève à la hauteur de l'historien. Mais cela ne se
 soutient pas. Quelquefois, cependant, dans ce récit sans façon il
 se rencontre une expression poétique choisie. Elle n'est pas
 cherchée, elle est venue tout naturellement. Correct sans être
 élégant, Raymond rappelle souvent Grégoire de Tours, son pré-
 décesseur en chronique de cinq siècles. Mais dans ce latin qui va
 finir, on sent l'approche de la langue nationale qui bégaie déjà
 ses premiers mots. Les gallicismes sont cependant moins fréquents
 qu'on pourrait le croire. La narration est traînante, languissante,
et ce défaut devient plus apparent dans les pages qui suivent la
mort de Pons.
     Ce n'est ni un styliste ni un descriptif que Raymond. Il met
néanmoins dans les quelques descriptions qu'il est amené à faire,
un naturel tel, une telle vérité qu'elles paraissent avoir le fini du
talent, le poli de l'art. Ses paysages, —il les peint en quatre lignes
— doivent être fidèles ; on les sent vrais. « Il y avait une colline
sur laquelle était le château, très élevée et pierreuse, et un sentier
pénible dans lequel un seul cheval derrière un autre pouvait
marcher... » Les tableaux de la famine ont une précision qui
effraie * .

 1
     ... « La plupart des soldats vivaient du sang des'chevaux sans vouloir les tuer...