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466 LA. REVUE LYONNAISE joyeux Langatroubeou, qui les appelait à toutevolée.justifiantdeson mieux son surnom de Gueule-de-Fer. Il retrouvait les sonorités harmonieuses del'accent cévenol pour promettre montset merveilles. On eut des merveilles, car voici ce qui arriva; et Mohély elle- mêe, ayant fait trêve un moment à ses périlleux exercices, et jeté une mante de moire azur sur son costume hindou, Mohély en fut témoin. Le huitième péché capital, la curiosité, la tenait; elle paya à son barnum une heure de liberté, et donna quarante sous à la sor- cirèe en douillette pour être placée au premier rang. Personne, on le concevra, ne fit la moindre attention aux baga- telles de la porte, aux préliminaires du spectacle Qu'est-ce que cela faisait que le pitre avalât des étoupes enflammées, que la dan- seuse se fît rompre des blocs de granit sur le ventre, que Langa- troubeou se passât des lames de sabre au travers du corps. Ce qu'on voulait voir, c'était Pierrot,'Pierrot dompteur, Pierrot dompteur de chats. Un belluaire en miniature, une cohorte de chats. Et Pierrot parut. Non le classique Pierrot en pantalon blanc et blouse blanche avec de gros boutons. Mais un Pierrot en culotte courte, bas de soie, habit noir doublé de satin blanc, la large colle- rette gauderbnnée autour du cou, le serre-tête cachant les cheveux, la face enfarinée, avec les lèvres passées au carmin, et les sourcils dessinés en accent circonflexe. Ainsi vêtu, il était fort joli notre ami Régis, malgré son épaule bossue, malgré ses jambes en cer- ceau, malgré sa taille naine. Il salua gravement l'assemblée, puis donna le signal. Ce fut aussitôt un formidable concert de miaulements, et, par des chattières habilement ménagées, des quantités de chats apparurent, colletés de velours rouge, quelques-uns parés de rubans, d'autres de chaînettes d'acier, les plus petits avec des colliers à grelots. Et toute cette bande féline, rangée en bon ordre, vint saluer aussi les spectateurs. Alors commença la pantomine par une série de sauts, exécutés avec la prodigieuse souplesse de ces animaux; puis ce furent des exercices gymnastiques, des bonds à travers des cerceaux couverts de papier rose ; un simulacre de bataille au milieu d'un déluge de fusées et d'artifices enflammés. Peu à peu cependant, les chats, surrexcités par les cris, par le