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526 LA REVUE LYONNAISE A la partie supérieure du soubassement se lisait en grandes lettres de bronze l'épigraphe ROMAE ET AVGVSTO, et sur une autre partie se présentait une inscription d'étendue considérable dans laquelle étaient nommées toutes les cités qui avaient contribué à l'érection de l'autel, au nombre de soixante d'après Stra- bon s'exprimant peut-être en chiffres ronds; de soixante-quatre d'après Tacite confirmé par Ptolémée, qui énumère dix-sept cités en Aquitaine, vingt-cinq dans la Lyonnaise et vingt-deux dans la Belgique. Entre autres dépendances de l'autel, il faut ne pas manquer d'indiquer un temple de Rome et d'Auguste, qui dominait au-dessus du Rhône et aux murs duquel était fixée la Table de Claude, et, du côté opposé, un amphithéâtre, situé en partie sur l'emplacement de l'ancien Jardin des Plantes. Chaque année, au mois d'août, se tenait, au confluent des deux fleuves, une assemblée des délégués des cités des trois provinces, sorte de continuation des assemblées nationales de la Gaule avant la conquête. Elle avait lieu du 1 er août à la fin du mois et coïncidait avec une foire qui durait le même temps et où l'on venait de tous les points du monde. L'assemblée des trois Gaules subsistait encore au temps de l'empereur Sévère Alexandre. Les délégués qui la composaient de- vaient tous être Gaulois de naissance et avoir rempli, chacun dans sa cité, les plus hautes fonctions municipales; leur titre était celui de legatus. Pour les pré- sider et pour desservir comme prêtre le culte d'Auguste, ils élisaient un d'entre eux qui prenait le titre de sacerdos ad aram Augusti ad ou inter confluentes Araris de Rhodani, ou ad aram Caesaris ou Caesarum ou Augustorum apud templum Romae et Augusti ad ou inter confluentes Araris et Rho- dani, ou simplement ad aram ad confluentes, ou plus simplement encore, ad aram ou bien celui de sacerdos trium Galliarum. On s'y occupait avant tout et principalement du culte impérial, mais aussi quelque peu, — au moins en avait-on dans une certaine mesure un droit plus ou moins illusoire, — des intérêts politiques du pays ; car on pouvait, paraît-il, y formuler non seulement des protestations de loyauté et des félicitations au prince pour quelque événe- ment heureux, mais même des vœux et des doléances, qu'une députation allait ensuite déposer sous forme d'humble supplique aux pieds de l'empereur. D'après le peu qu'on en sait, on n'a pas à concevoir une très haute opinion de l'esprit de civisme et d'inde'pendance qui animait cette assemblée nationale. Lorsque Néron eut assassiné sa mère, la députation gauloise adressa par la bouche du rhéteur Julius Africanus ces paroles à l'empereur parricide : « Tes provinces de la Gaule t'en supplient, César, puisses-tu supporter courageusement ton bon- heur! » .... Si par hasard un délégué, moins timoré que la plupart, essayait de proposer une motion de blâme contre quelque haut fonctionnaire par trop préva- ricateur, comme l'inscription de Thorigny nous en montre un rare et curieux exemple, il s'apercevait bien vite et amèrement, à l'opposition qu'il soulevait dans l'assemblée même, « que réclamer justice contre un personnage puissant était une entreprise absolument sans espoir ». (Voy. dans Rev. épigr., 1. p. 91, Lyon à Vépoque romaine, de M. Hirschfeld). Ce que les délégués avaient surtout à cœur, c'était de fêter avec pompe et éclat la divinité impériale par des magnificences et des spectacles, de décréter des honneurs au prince régnant, — et l'on voit par les beaux fragments retrouvés de plusieurs statues colossales dont une aurait eu environ treize mètres de haut, et d'une quinzaine de statues équestres en bronze qu'on suppose avoir été des