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VOYAGE DE FRANGE ET D'ITALIE 347 Si vous voulez voir la ville d'un poste avantageux, allez à Notre- Dame de Fourvière, église placée dans le lieu le plus éminent ; de là elle paroîtra toute à vos yeux, grande, belle et fort ramassée ; vous en admirerez la situation, vous découvrirez facilement comme elle est traversée par le Rosne et la Saône qui luy donnent un tel éclat que vous la jugerez la plus superbe ville du Royaume, vous jetterez votre vue au long des remparts et des murailles, et considérerez dans son assiette tantost les montagnes et les vallées, tantost les plaines, tantost les beaux palais qui sont en grand nombre, parmy lesquels ceuy qui méritent davantage vostre curiosité, sont la Cha- rité, l'Hostel de ville et l'Hospital : l'on me fit de ce lieu l'anatomie de toute la ville, que je vis après plus à loisir, ma curiosité n'étant point encore satisfaite jusqu'à ce que j'eusse veu en détail ce que je n'avois appris qu'avec confusion. Le vingt-cinquième septembre j'allay voir l'église de Saint-Jean, qui fut premièrement dédiée par Saint-Alpin à Saint-Éstienne, elle est considérable non seulement pour son antiquité, mais aussi pour sa dignité, estant desservie par neuf dignités et vingt-six chanoines, qui sont tous comtes et nobles de quatre races. Les rois de France et les ducs de Savoye en sont chanoines, comme estoient autrefois les ducs de Rourgogne qui les ont enrichis et donné de si belles terres qu'ils se trouvent aujourd'huy avoir plus de deux cent mil livres de rente pour partager aux ecclésiastiques, qui composent le clergé de cette église, dont je ne puis sortir que je ne dise ce que j'y ay remarqué de particulier. Toutes choses m'y ont paru singulières : elle est belle et grande, vous n'y voyez ni tableaux ny tapisseries ; mais bien le chœur des chanoines, dont les sièges sont de marbre, età l'extrémité un autel fort bas, ou sont deux petits chandeliers et une croix : ils chantent par cœur, et officient les jours solemnels avec le plus bel ordre que l'on puisse souhaiter. Saint-Irénée qui y est mort martyr en a été le premier évesque, et la rendit la primatie de toutes les Gaules, et reçoit encore aujourd'huy les appellations de toutes les églises de France, et de là elles sont portées directement à Rome. Son archevesque mort, l'évesque d'Autun en est l'œconome, et entre dans tous les droits ; comme aussi dans la vacance d'Autun, l'arche- vesque de Lyon en jouit par œconomat. Je ne pourroispas approuver de laisser ainsi leur église dépouillée de toutes sortes d'ornements,