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226 LA R E V U E LYONNAISE LA CÉRAMIQUE ITALIENNE; sigles et monogrammes, par M. F. DE M É L T . Librairie de Firrain Didot etCie. 56, rue Jacob. Paris, 1884(248 p.) Il n'y a pas encore bien des années que la céramique, relativement moderne, a fait l'objet de l'attention, puis de l'étude de quelques amateurs et de savants. On ne s'était attaché, pour ainsi dire, qu'à la céramique antique que nous avaient légués les Egyptiens, les Grecs et particulièrement celle qui se rencontrait dans les nécropoles étrusques, si riches en monuments de ce genre et d'une beauté qu'on ne saurait assez admirer. Toutefois, on recueillait, depuis un certain temps, dans nos Musées quelques pièces de faïence, hors ligne, chefs-d'œuvres de la Re- naissance, qui s'imposaient à l'attention publique ; mais la faïence, en général, à moins qu'elle ne portât la signature de quelque célébrité, était délaissée, dédai- gnée et ce trop long dédain a. été la cause de la perte de plus d'un objet d'art à jamais regrettable. Qui, en effet, ne se souvient d'avoir rencontré sur les cré- dences de maisons de paysans, des plats, des aiguières mêmes, sortis des fabri- ques de Rouen, de Moustiers ou de Nevers, repoussés des châteaux dont ils avaient fait jadis l'ornement et donnés au premier venu parce que la mode en était passée? Mais heureusement il s'est rencontré quelques hommes de goût et de s'avoir qui ont reconnu que ces plats, ces assiettes, ces soupières, ces vases de tous genres et si méprisés formaient une branche importante de l'art de nos pères et les ont étudiés avec un soin tout spécial. De cette attentive étude sont sortis d'excellents traités sur les produits des principales fabriques comme celles de Moustiers, de Rouen, de Neverst de Limoges, et même sur les ustensiles les plus modestes sortis d'humbles localités où l'on ne soupçonnait même pas qu'il y eût eu jamais des fabriques d'une certaine importance. La mode qui avait fait passer jadis nos plus belles faïences de la maison du riche dans les chaumières n'a pas manqué non plus de se prendre d'une fiévreuse passion pour elle3, de les exhu- mer de leur obscurité et de faire monter leur prix à des taux souvent fabuleux. Mais si nous connaissons aujourd'hui notre vieille céramique nationale, il n'en était pas de même de celle d'Italie dont nous avions bien vu de splendides spé- cimens dans des collections publiques ou privées, mais bien peu savaient son véritable lieu d'origine et son histoire. Cependant depuis qu'on connaît cette his- toire, dut-il en coûter à notre amour-propre de Français, nous sommes bien forcés d'avouer maintenant que les produits italiens sont infiniment supérieurs aux nôtres. M. de Mely qui a écrit un si excellent livre sur la céramique italienne, a dû aussi faire cet aveu. Il dit, en effet, avec justesse,«ce qui vientencore ajouter un mérite incontestable aux produits des grandes manufactures italiennes, c'est qu'il n'en est pas de ces plats merveilleux, de ces aiguières gracieuses, de ces va^es savamment étudiés, comme des faïences françaises, les Rouen, les Nevers, les Moustiers. Ces dernières ne peuvent réellement trouver place que dans les véritables collections ; il faut être essentiellement amateur, je dirai même con- naisseur, pour aimer nos produits nationaux. » Mais d'où vient notre infériorité ? Je laisse encore à M. deMély le soin de nous le dire; cette infériorité tient à ce que dans la céramique italienne on trouve toujours Fart qui rarement se ren- contre dans la nôtre, soit qu'il s'applique à charmer l'œil par le contraste des