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96 LA REVUE LYONNAISE de Villeneuve de Béziers, pour sa poésie dialoguée sur Caramantran, le carna- val, la meilleure du concours, à MM Fourès, Chalamel, abbé Malignon, Fabre des Essarts, Jouveau (musique) et Gabriel Ferrier (dessin) etc., e t c . . Glorieuse énumération de lauréats de toutes les parties du Midi, frénétiquement applaudie. On s'est ensuite rendu au petit jardinet de Florian, où Anatole Lionnet a dit de beaux vers de M. Fabre des Essarts ; de là dans le Parc, où le concert a com- mencé. On entendit d'abord l'orchestre de M. Charles de Sivry, le tambourinaire, orchestre de tziganes provençaux spontané et troublant avec ses aubades, ses fa- randoles, ses rigaudons, si co'.orés, si pleins de sève indigène. La Marche des Rois surtout a enlevé l'assistance. Puis les frères Lionnet, ces Coquelin du félibrige, ont délicieusement déroulé leurs arabesques mélodiques; la gracieuse M"e Hamann de l'Opéra et M" 8 Cécile Bernier du Vaudeville ont soupiré les deux célèbres duos de Mireille, français et provençal — celui-là est le bon ; — MHe Rousseil, la grande tragédienne, a fait frissonner en disant la Cabe- laduro de Nerte, et la sémillante Estello, une bourgadiero do Nimes, a émous- tillé l'auditoire avec le Ploù e souleio de Paul Arène, divinement interprété par le félibre musicien Léopold Dauphin. Je Lutine à travers mes souvenirs. Le programme semblait long, mais l'exquise assemblée qui n'était guère venue que pour le discours de Mistral, si patriotique- ment acclamé — lui fit bon accueil jusqu'au bout. Il se sentait mieux qu'en terre provençale : c'était l'à me elle-même du pays qui pénétrait tout, ce jour-là . L'arrivée du poète sur l'estrade fut par trois fois acclamée. Il commença par lire son discours en français après quoi, sur l'unanime réclamation de la foule, il consentit à dire le texte provençal. Voici le texte français, l'Armana devant publier l'autre : Mesdames et Messieurs, Il y a aujourd'hui quatre siècles que la Provence, ayant jeté son nom dans toutes les aventures chevaleresques et romanesques, ayant usé, enfin, dans l'ardeur de sa vie, quatre dynasties de rois, il y a aujourd'hui quatre siècles que la Provence indépendante s'est donnée librement à la nation française... Dans l'histoire, Messieurs, nous ne voyons que 1rop de déchirures, de races mor- celées et de pauvres provinces que l'on a serrées malgré elles et arrachées à leur patrie.Etc'estun fait bien remarquable, un merveilleux événement, que de rencontrer un peuple jeune, joyeux, maître de lui, qui, pouvant rester libre, vient s'unir par amour au peuple qui lui plaît!... Or cela ne s'est vu que pour la France, que pour la sympathique et douce France! Honneur à elle ! C'est en mémoire de ce faste que nous, félibres, venons enthousiastes faire fête à Paris,'aveo notre jeunesse, avec notre soleil, nos chansons, notre tambourin. Donc il y a 400ans les États généraux des cités provençales dirent à la France, un beau jour : « I.e pays de Provence avec sa mer d'azur, avec ses Alpes et ses plaines,de plein gré, spontanément, s'unit à toi, ô France! non, toutefois comme un accessoire s'unit à un principal , mais comme un principal s'unit à un autre principal! ce qui ve-it dire que nous conserverons nos franchises, nos cou- tumes, notre langue. »