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                    UN NOUVEAU GENRE

      A NOTRE                 GRAND-THÉATRE




     C'est ordinairement autour des entreprises en détresse qu'on
 entend bourdonner, agent et signe de décomposition prochaine,
 les faiseurs de projets, les auteurs de recettes infaillibles. Moi,
 tout au contraire, je m'attache à l'une de nos institutions les plus
 florissantes, et c'est le moment même où elle est en pleine pros-
 périté que je choisis pour dire à son habile directeur -. « Pro-
 fitez-en pour faire mieux encore ! »
    Le succès de l'Africaine sur notre première scène est plus
qu'un fait accidentel. Il faut y voir une révélation. Or, toute révé-
lation porte avec elle son enseignement. La foule bigarrée qui
pendant trente soirées consécutives encombrait les galeries de
tout rang, n'avait cédé, pour affronter cette fatigue, ni à un mo-
bile,ni à une curiosité vulgaires. Il est fort possible, et l'on y comp-
tait d'avance, que la splendeur des décors, le luxe des armures,
l'élégante richesse de l'ensemble chorégraphique, ait constitué
l'attraction préparatoire. Mais, le premier coup d'archet donné,
tous ces braves gens, de quelque bourgade qu'ils vinssent,
quelque métier, banque, comptoir, étal qu'ils eussent quittés pour
être là. devenaient auditeurs, exclusivement auditeurs. C'est la
suave et forte pensée du maestro qu'ils suivaient avec le recueille-
ment de dilettanti consommés. C'est cette musique savante,
mais d'une science si accessible, et qui paye si pleinement de sa
peine le néophyte dévoué, qu'on les voyait subir d'abord, bientôt
étudier, puis saisir, comprendre et finalement savourer.
  Eh bien ! des auditeurs de si bonne volonté ne viennent-ils
pas de donner leur mesure ? Parce qu'on peut attendre d'eux, ne