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366                     ORIGINES DE LUGDUNUM.
    — Rossière, Roussière, poype qui subsiste ; Mont-Rosard,
 poype disparue depuis longues années, ont leur origine dans l'é-
lément ros, rhos, tertre, cap, terrain en pente, tout objet qui
 croît en hauteur et grandeur, conservé parle néo-celtique (1).
    Ros appartint aussi à la langue des Ligures, et sa présence
dans une multitude de noms de lieu du midi et de l'est de la
Gaule doit être attribuée à ce peuple plutôt qu'à nos ancêtres.
    Lorsque Annibal, après avoir franchi les Pyrénées, régla les
conditions de son passage sur le territoire des peuplades réunies
à Rouscinon, aujourd'hui Castel-Roussillon (2), ces indigènes
stipulèrent que leurs femmes seules seraient juges des réclama-
tions élevées contre leurs nationaux par des Carthaginois (3).
Cette condition étrange, dont l'illustre capitaine n'eut, dit-on,
qu'à se féliciter, tenait à une coutume particulière aux nations
liguriennes : chez ces nations, les femmes avaient droit de con-
 naître de toutes les contestations publiques ou privées (4). Le
 fait en lui-même n'a,pour moi que peu d'importance, pourtant
j'en tire cette conclusion, ici très-considérable, c'est que les tri-
 bus avec qui traitait Annibal, étaient une race ligurienne et que
Ruscinon, leur oppidum, avait un nom dépendant de l'idiome de
cette race Mais quel était cet idiome? Les Ligures ont disparu de
la face du monde sans laisser de monuments. Pline et quelques
autres écrivains de l'antiquité nous ont conservé un petit nom-

   (1) Arm. ros, ross, tertre inculte, terrain en pente qui regarde la mer :
terros, hauteur rude, Kerros, le hameau du tertre, Roslan, le monticule de
la lande ; gall. rhos, ce qui s'accroît ou s'accumule ; ers. ros, cap, isthme
— ail. re»-sen, isl. reis-a, ang. ris-e, prêt, ros-e, élever, hausser, d'où
ris-e, avancement, saillie, lever du soleil, — gr. inusit. p«M, fut. pw<7-w,
remparer, — sansc. ruh, surgir, croître.
   (2) Le peuple Sarde, Sardon ou Sorde, divisé en deux branches : celle
d'Hispanie (Plin., III, 7) et celle des.Pyrénées orientales (Mêla, II, 5).
Ruscino, l'oppidum de cette dernière, avait donné son nom à la tribu la
plus voisine de ses murs, les Roscini ou Roscinales, d'où s'était formée la
dénomination de Rowsillon, que portait la contrée avant 1789.
   (3) Plutarch., De virtut. mulier., p. 149. — Polyœn., lib. VII, c. 50.
  (4) Plutarch., id., p. 246. — Polyœn., ibid.