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ETODE SUR L'AFRICAINE. 335 dieime ; les beautés matérielles l'ont frappé, l'art l'a ému! Son initiation a débuté par un chef-d'œuvre ; car tout ce qu'on a pu dire contre celte partition n'ôte rien de son mérite énorme. On lui a reproché d'être une réminiscence des Huguenots, du Prophète, de l'Etoile du Nord, c'est pos- sible, mais l'Africaine n'a-t-elle pas pu être faite antérieu- rement a ces opéras ? et alors elle serait le modèle au lieu d'être le pastiche. Et d'ailleurs, peu importe,. Meyerbeer avait le droit de se copier, de se redire ; il est permis de radoter quand on radote de la sorte. VAfricaine a-t-elle un cachet, une couleur spéciale? Je ne puis pour ma part lui en trouver d'autre que celle que Meyerbeer met a tout ce qu'il touche. On a trouvé que le rôle de Nélusko é^ait oriental au possible ; il ne me semble pas plus étrange que certaines parties de l'Etoile du Nord. Vétrange c'est là ce qui caractérise Meyerbeer. Mettez des paroles indiennes sur l'air du pif, paf, des ,fliM/ueno(s,et l'on s'écriera: « Comme c'est oriental! » Non, la musique de l'Africaine n'est pas plus orientale qu'une autre, elle est étrange comme tout ce qu'a fait Meyerbeer. Celte étrangeté est du reste plus judaïque qu'autre chose ; les rhythmes hé- braïques , qui inspiraient ies schergos de Mendelshonn, se retrouvent dans le genre spécial de Meyerbeer. Mais on ne peut pas appeler cela de la couleur locale. La couleur locale a été exactement rendue par Félicien David, et ce n'est pas 1k du Meyerbeer. Je n'ai pas compris pourquoi on reprochait à l'Africaine de manquer de mélodies. On sort de la représentation, pré- tend-on, sans avoir un air dans la tête. Si les gens qui se plaignent de cela se rappellent l'effet que leur a produit les autres ouvrages de Meyerbeer, ils se souviendront qu'à la première audition ils en sont sortis aussi ahuris, aussi écra- sés. C'est là le fait de toutes les grandes partitions. J'ai pour-