page suivante »
JACQUES DE VINTIMILLE. „ 117 naïve ou l'humeur satirique de nos pères : il fallait pui- ser aux sources d'une littérature plus étendue et plus élevée ce qui lui manquait, et lui donner ae cette manière comme une expérience anticipée. De bonnes traductions, en dissipant l'ignorance, étaient le moyen le plus sûr d'atteindre ce résultat. C'est ce que comprit Vintimille, moins hardi sans doute , mais beaucoup plus sage que Ronsard et sa pléiade, qui, pour avoir voulu trop tôt marcher seuls, se perdirent, et par l'importation mala- droite d'idiotismes grecs et latins dans notre langue, mi- rent en péril son heureuse ingénuité. Vintimille , disons- nous, ne voulut parler que la langue ordinaire, et il rendit ainsi un véritable service à la littérature : « C'est ce que j'estime, écrit-il, devoir estre gardé « principalement es traductions , et trouve bon d'escrire « tout ainsi que je parle , espérant que la France me re- « cognoistra, non pour hoste, mais pour enfant, et m'en- « tendra sans truchement : et comme le François aime la « rondeur et simplicité , il ne rejettera la naïfveté et » candeur dont je fais estât, usant d'un langage com- « mun, non fardé et vrayement françois, quej'ay appris « au sortir de Rhodes, des mieux parlans de la cour (1). » Le choix de la Cyropédie, ce roman moral, qui fut à peu près pour l'antiquité ce qu'a été pour nous le Tèlè- rnaque , convenait à Vintimille, qui, comme plusieurs personnages éminents des quinzième et seizième siècles , appartenait par ses tendances élevées à l'école socratique ou platonicienne. Les deux premiers livres de sa traduc- tion étaient terminés ; il les avait recopiés de sa main, et venait de les offrir au roi, en 1547 , quand celui-ci mourut à Rambouillet. (1) Âdwrtiiiemetit et remonstrance aux censeurs de la langue française. * S