Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
346                  UNE NUIT DANS LES RUES.
      Te faut-il à fouler l'herbe qu'elle a foulée ?
      Les bois où , dans le jour la colombe la suit?
      Les Alpes déployant leur ligne crénelée ,
      Comme des murs d'argent qui supportent la nuit?

      Non , non , il te suffit pour que ton cœur s'émeuve ,
      De ce vent qui chuchotte en effleurant les toits ;
      11 suffit, sous ce pont, d'ouïr gronder le fleuve ;
      Le pavé des cités vaut la mousse des bois.

                                   II.

      — Oh ! tandis que rôdant, ici, de rue en rue ,
      J'attendrai que la nuit ait achevé son cours,
      Dors en paix, loin de moi, toi qui m'es apparue
      Comme un doux arc-en-ciel, t o i , le chant de mes jours !

      Dors en paix. — Mon esprit t'environne et t'embrasse ;
      Je sais quels hauts sommets, quel-ciel pur et lacté
      Te font un horizon qui rehausse ta grâce,
      Un horizon de neige autourcle ta'beauté.

      Je sais que de ton lit si j'écartais les voiles ,
      Sur ton beau front dont rien n "égale la pâleur,
      Je verrais s'effeuiller les tremblantes étoiles,
      Comme aux vente du printemps les amandiers en fleur.

      Croise donc sur ton sein tes deux mains virginales;
      Le soir , quand l'air fraîchit sous le ciel plus obscur,
      Le nymphéa sous l'eau dérobe ses pétales ;
      Il parfume en dormant son sépulcre d'azur.

      Dors ainsi, dors en moi, viens-y ployer ton aile ;
      Comme le lys au lac ton sommeil m'appartient •,
      L'onde entend respirer la fleur qui vit en elle,
      Que j'entende en mon cœur le battement du tien.

                                               J.   TISSEUR.