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698 LA REVUK LYONNAISE plus », cette diversité d'aptitudes ajoutant peu de chose à sa grandeur. Ingénieux, élégant, délicat, Cicéron manque généralement d'énergie, j'entends cette souveraine énergie qui caractérise Démosthène. En Démosthène l'orateur domine, en Cicéron l'avocat. L'un a plus de génie, l'autre plus de talent. Il semble que la patrie parle par la voix de l'orateur grec. En ceci, il est bien « orateur ». Orator signifie député, ambassadeur, délégué du peuple. L'ora- teur est la bouche (Os), d'une nation. Cicéron s'oublie moins, s'efface moins. La République lui importe beaucoup, on n'en peut douter, mais il ne préfère pas assez, ce semble, Rome à toute chose, même à sa gloire, ni à toute personne, même à lui. 0 fortunatam Romam me consule naiam ! Tant de vanité rapetisse l'homme, rapetisse l'orateur. Au temps de Cicéron, la toge et le glaive se disputaient Rome, c'est-à -dire l'univers. La victoire flotta longtemps entre les camps et les rostres; les rostres, c'était Cicéron, les camps Octave... Mais lorsque le temps n'est pas à la vertu, pas même à la loi, la force a finalement gain de cause contre la raison ; et l'épée « tranche » la parole. Cicéron, las d'angoisse et d'incertitude, désespérant de mettre jamais l'ordre dans l'État, voulut du moins le mettre dans sa conscience ; sa vie devait payer cette noble résolution. Peu de jours après, on le vit s'accouder tranquillement sur le rebord de sa litière, et tendre sa tète aux émissaires d'Antoine, sans dire mot, lui qui avait tant à dire, lui qui disait si bien 1 Toutes les sublimes attitudes, toutes les phrases pathétiques de sa longue carrière oratoire n'égalent point le sublime de ce calme ni le pathétique de ce silence... Auguste surprit un jour son petit-fils qui lisait en cachette Cicéron : « Lisez-le, dit celui qui fut Octave, lisez-le sans crainte ; c'était un grand homme, et qui aimait bien sa patrie ! » Honte à l'ingrat triumvir. Hommage au véridique empereur. * C'était l'usage, à Rome, d'accompagner avec la flûte l'exorde