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608 LA REVUE LYONNAISE Et dans Millevoye, ils prêtent à rire : Quittez pour l'Océan la source Aganippide. Muses ! chantez Caltha... C'était dans la Ghalcyde. A ses festins funèbres r r Ganictor, appelant tous les chantres célèbres... Ainsi quelques syllabes suffisent pour révéler le poète. III Dans l'Idole apparaît pour la première fois ce qui fut peut-être le caractère le plus distinctif de Jean Tisseur. Si nous vivions encore au temps où il était de mode de donner des surnoms aux poètes, on l'eût dénommé le « Poète du printemps » ; ce n'est pas assez, il eût fallu dire de l'aurore du printemps. Je ne saurais exprimer, en effet quelle influence mystérieuse a, durant toute sa vie, exercé sur lui l'apparition delà saison nouvelle. On eût dit véritablement qu'à ce moment de l'année, par une affinité étrange et cachée, à la façon de l'Hermia de Laprade, sa vie personnelle retenait quelque chose delà vie de la nature. La vue du premier arbre dont les branches noires se couvraient d'étoiles blanches, le jetait toujours dans un enivrement inoui ; il le dit lui-même : Cette apparition me trouble; je ressens L'émoi délicieux des cœurs adolescents. Les premiers vers d'une pièce Au printemps, qui ne fut jamais terminée, expriment cette sensation de façon superbe : Jamais, jamais porté sur une molle nue, Ton char tressé de fleurs n'a passé dans les airs Sans que mon cœur troublé ne te dise des vers ! Dans les Voûtes blanches il a peint d'une manière exquise la sensation de divine pureté que lui apportaient les Arbres d'argent, piliers aux chapiteaux fleuris.