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                                    FELlKUlCiK                                       537



LI PLÂGNUN DÔU TAMBOURINAIKE                     LES PLAINTES DU TAMBOURINAIRE

     « 0 Tistet, viei tambourinaire,               « O Tistet, vieux tambourinaire, —
     Tistet, moun paure trenquejaire,            Tistet, mon pauvre paysan, — pour-
                                                 quoi, muet et seul, pécaira! — Toi
     Perqu mut e soulé, péeaire !                qui étais le plus alerte entre les Pro-
Tu qu'ores lou plus lèri entre li Prouvençau,    vençaux — si vaillant et si plaisant,
     Tant valent o lan fouligau,                 — l'air grognon, pourquoi rêves-tu
L'èr renosi, perqué pantaies de la sorto,        de la sorte. — accroupi devan t la porte
                                                 — fleurie de ta maison.
     Agroumouli davans la porto
     Enflourido de toun oustau.

    « Lè'i ! Tistet, partèn a la lesto !            « Vite, Tistet ! partons lestement ! —
    Perqué baissos ta blanco tàsto ?              Pourquoi baisses-tu ta blanche tête?
                                                 — Tu ne sais donc pas que c'est jour
    Saves dounc pas qu'ei jour de festo
                                                 do fête, -~ et que dans le pays les
E que dins lou pais, li chat se faran béu?       jeunes gens se feront beaux? — De
    Ue la Sambuco a l'Estorèu,                   la Sambuque à l'Esterel — et du port
E dôu port de Touloun au grau de Magalouno,      deToulon au grau de Maguelonne, —
                                                 les garçons et les fillettes — ont la
    Li jouvenet e li chatouno                    taiolo et le chapeau.
    An la taiolo e lou capéu

     « Emé ta cabro e ta berouge,                  « Avec ta chèvre et ta brebis, —
    Lou mourre dins li man, aurouge,             la ligure dans les mains, farouche, —
                                                 tu rêves, et ton panache rouge —
    Pantaies ! E ta cresto rouge                 traîne sur la terre au pied des chênes,
Rebalo sus la terro au pè dis agarrus,           — dans les genêts et dans les ronces;
    Dins li ginesto e dins li brus ;             — viens vers le champ ileuri de
Veni dins lou campas flouri de t'erigoulo,       thym — où tournent les farandoles,
                                                 — où bondissent les chevaux frux. »
    Ounte viran li farandoulo,
    Ounto trépan li chivau frus. >i

   — « Taiso te, brava cambarado !                 — « Tais-toi, brave camarade ! — Je
                                                 veux, sous les buissons,— sous les
   Vole, souto uno bouissounado,                 peupliers frais, — me répond l'aïeul,
   Souto mi pibo enfresqueir'ado,                dormir à mon gré ; — sur l'herbe
— Lou reire me respond — dourmi tout moun        douce de velours, — près d'un puits
                                       [sadou    garni de gazon et de lambrusque,—
                                                 où les abeilles ont leur essaim, — j'ai
   Sus L'erbo douço de velout,
                                                 découvert mon cagnard.
Emprès d'un pousgarni decledo e de lambrusco,
   Ounte lis aliho an si brusco,
   Ai descubert moun cagnadou.
                                                   « Ils se taisent, les tambourinaires,
    « Se taison, li tambourinaire,               — les vaillants et vieux rieurs. —
    Li valent e viei galejaire :                 Allez payer les violoneux — du pays
    Anàs paga li viôulounairo                    de là haut, mes drôles! Allez payer
                                                 •— les violoneux excommuniés ! —
Dôu pais d'amoundàu, mi drolc ! anas paga
                                                 tant qu'ils viendront, ceux-là, aux
    Li viôulounaire escumerga.                   fêtes provençales, — nous serons
Tant que vendrau aqueli i festo prouvençalo,      muets comme les cigales — quand
    Sarèn mut coume li cigalo                    leurs petits miroirs sont crevés.

    Quand si miraiouu soun creba.
      Novjisntuis 1884. - T. VIII