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                               SAPHO                               315
résultat : dix ans de réclusion à l'un et six mois de prévention à
l'autre... Pouah!
    Le quartier latin n'est plus supportable à Jean : « Tous ces ména-
ges d'une nuit le gênent, déshonorent le sien ». Où la fierté va-t-elle
se nicher !.. « Et l'on se met en quête d'une nouvelle installation. »
    Le vice se met chez soi dans un appartement à souhait, rue
d'Amsterdam.
    Les « nervosités »! Les « délicatesses »...
     « Tous y sont pris, les meilleurs, les plus honnêtes, par cet ins-
 tinct de propreté, ce goût du « home » qu'ont mis en eux l'éduca-
 tion familiale, et la tiédeur du foyer. » Un peu plus, ce serait le
 Castelet du père Gaussin, et non l'appartement de la rue d'Ams_
 terdam, qui aurait tort!
     Jean Gaussin trouvera-t-il cette fois le bonheur? Oh que non
 pas! Le plaisir! le plaisir qui se cache, non parce qu'il se suffit,
 mais parce qu'il a honte, mais parce qu'il a peur. « Extrema gau-
 dii hictus occupât » a dit quelqu'un qui s'y entendait. C'est le cas
 de Jean Gaussin, toujours rassasié et jamais assouvi, plein de
 trouble, de remords peut-être, las de lui-même et même d'elle !
     Certaines fois, des convulsions d'orgueil, d'honneur si vous
 le voulez, le prennent, et alors le ménage périclite. Mais Sapho la
 dompteuse regarde son joli fauve, lui sourit, le caresse, et le ré-
 volté « va se coucher » quitte à se réveiller plus misérable.
     Sapho l'a fasciné : « Celles qu'il avait connues jusque-là, des
 filles de brasseries ou de skating, quelquefois jeunes et jolies, lui
 laissaient toujours le dégoût de leur rire bête, de leurs mains de
  cuisinières, d'une grossièreté d'instincts et de propos qui lui faisait
  ouvrir la fenêtre derrière elles. Dans sa croyance d'innocent (!) il
  pensait toutes les filles de plaisir pareilles. Aussi s'étonnait-il de
  trouver en Fanny une douceur, une réserve vraiment femme, avec
  cette supériorité — sur les bourgeoises qu'il rencontrait en Pro-
  vence chez sa mère —• d'un frottis d'art, d'une connaissance des
  choses qui rendaient ses causeries intéressantes et variées... »
      Ainsi, pendez-vous, ô Provençales, jeunes filles honnêtes
  épouses chastes et dévouées, mères aimantes, pendez-vous, puisque
  vous voilà inférieures, n'ayant pas « ce frottis d'art », cette « eau
   série » de la gourgandine Fanny-Sapho !