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— 511 — lourd didot. Ce qu'Edouard Pelletan, quarante ans plus tard, sentit avec tant de force et réalisa avec tant de bonheur, Perrin, vous le verrez plus loin, Messieurs, l'avait senti lui-même avec la plus parfaite netteté. Un peu avant 1850, en effet, l'occasion vint, pour Perrin, de donner toute la mesure de sa parfaite compréhension de la typographie. En 1846, Alphonse de Boissieu achevait la rédaction de son livre Inscriptions antiques de Lyon. Or, déjà , on ne jurait guère que par Perrin, à cette époque-là , dans le cénacle des bibliophiles lyonnais ; il ne pouvait venir à la pensée de Bois- sieu qu'un autre que lui pût imprimer son livre. Perrin, lui, pensa que tout ce que ses casses renfermaient de capitales dites romaines ne pouvait con- venir au livre d'Alphonse de Boissieu. Très simplement, d'un geste digne de l'antique, Perrin prit son crayon, il alla au Palais des Arts, et là , vingt fois parcourant le vieux cloître des Nonnains de Saint-Pierre, scrutant les pierres tombales, les sarcophages, les plaques dédicatoires, s'inspirant à cette pure source des formes antiques, il dessina des lettres. Et c'est de ce labeur de quelques mois que sortirent ces belles capitales augustales qui firent l'admiration des lettrés de cette époque. M. Marius Vachon (Les Arts et les Industries du Papier en France, Paris, p. 45) raconte à sa façon la tentative de Perrin. « Vers 1846, dit-il, un impri- meur lyonnais, Perrin, faisait graver pour les Inscriptions antiques de Lyon, de C. de Boissier [Alph. de Boissieu], des capitales augustales. Le didot ne s'harmonisant point avec elles autant qu'il le désirait, Perrin entreprit de rechercher dans les ateliers des fondeurs de cette ville des types à son goût ; il trouva chez Rey des séries de lettres de bas de casse, qui lui parurent réali- ser son idéal ; c'étaient des « elzevier » abandonnés depuis de bien longues années ; l'édition par son archaïsme obtint un grand succès de curiosité. Jules Claye fit le voyage de Lyon pour fouiller à son tour les mêmes ateliers, et il y découvrit aussi un certain nombre de matrices anciennes, au moyen desquelles il restitua plusieurs caractères de la Renaissance... Pendant vingt ans la typographie du dix-septième siècle eut la vogue ; les éditeurs ne rêvaient qu'« elzevier » pour les ouvrages de luxe et de fantaisie, quels qu'en fussent les auteurs, des écrivains modernes ou des écrivains anciens. Après 1871, il se produisit contre cette mode de rétrospectivité une énergique réaction, dont les témoignages publiés éclatent à chaque Exposition univer-