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— 510 — livres dont on peut parler ainsi ? Qu'avons-nous fait, nous, de cet art char- mant, légué par de tels maîtres, où l'avons-nous conduit, dans quelles ornières l'avons-nous dégradé, avili, prostitué ? Je n'ai pas assez de place ici pour examiner un à un, même rapidement, tous les livres qu'imprima Perrin pendant cette longue période qui va de son établissement à l'Hôtel de Malte jusqu'au milieu du xixe siècle. « La Typographie, nous raconte avec empire Fournier le jeune, que vous connaissez bien, dans le tome I du Manuel typographique de 1766, la Typographie est divisée en trois parties distinctes et essentielles, savoir, la Gravure, la Fonte et l'Impression. La pratique particulière de chacune de ces parties forme des artistes de différents genres. Celui qui grave ou taille des Caractères est un GRAVEUR ; celui qui les fond est un FONDEUR ; et celui .qui les imprime est un IMPRIMEUR ; mais il n'y a que celui qui réunit la science de ces trois parties que l'on puisse appeler un TYPOGRAPHE. Il y a eu peu d'artistes du premier genre, un peu plus du second, beaucoup du troi- sième, et très peu du quatrième, c'est-à -dire qui aient mérité le nom de Typographe. L'Imprimerie n'en compte que trois ou quatre au plus par siècle, qui aient été reconnus pour avoir réuni ces talens avec succès ». Jusque vers 1850, Perrin n'avait été qu'un « imprimeur », un techni- cien remarquable dont les mains façonnaient de délicieuses choses ; mais il n'avait encore songé qu'à ceci : imprimer de beaux livres, faire que cet art charmant de la typographie ne fût pas seulement œuvre aimable des doigts, placement soigneux de petits prismes de métal sur un composteur, gracieux arrangements de blancs espaces en des pages bien agencées. Cela, c'est ce que fait l'imprimeur habile ; l'imprimeur artiste, lui, a d'autres soucis : il voudrait que les livres sur quoi il besogne tant qu'il peut fussent autre chose encore ; il voudrait que le caractère avec lequel un livre est imprimé fût en parfaite harmonie avec le sujet qu'il traite ; qu'une oraison funèbre ne fût pas composée avec une lettre frivole, ni une poésie légère avec un