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     Au printemps de 1915, le roi Constantin renvoya brusquement du
pouvoir, démissionna en d'autres termes M. Venizelos ; en même temps
il procéda à la dissolution de la Chambre et chargea M. Gounaris de
présider aux élections. M. Gounaris ne manque pas de valeur, c'est le
seul qui tranche un peu sur la médiocrité des politiciens grecs, il est
certainement très supérieur aux Lambros, aux Scouloudis, aux Zaïmis
même qu'on a vu pendant l'absence de M. Venizelos défiler au pouvoir
au cours des dernières années. Mais il serait peut-être exagéré de penser
qu'il est très scrupuleux sur les moyens qu'il emploie : il n'est certes pas
homme à s'arrêter à de vains soucis d'extrême loyauté électorale. Il fit
donc les élections de son mieux, c'est-à-dire qu'il les fit énergiquement.
Cependant ce fut une Chambre venizeliste que le corps électoral, malgré
l'appui non dissimulé du roi, renvoya siéger rue du Stade. M. Gounaris
lui-même fut élu à grand'peine et seul de sa liste à Patras. Le gouverne-
ment n'eut vraiment de succès qu'en Macédoine, pays nouvellement
annexé et où il n'y avait jamais eu d'élection, pays de population mêlée
où les éléments turc et juif, travaillés par le préfet Gondas, marchèrent
à fond avec les Gounaristes qui passèrent tous. Ce fut d'ailleurs un spec-
tacle paradoxal de voir le consul de Turquie faire* les élections grecques
à Salonique, ville cédée par la Turquie à la Grèce depuis moins d'une
année. Le résultat fut qu'on put contempler le jour du vote le bataillon
serré des Musulmans se rendant aux urnes sous la conduite des mufti
et des ulémas pour voter avec résolution, sinon avec enthousiasme, pour
les candidats chers au roi Constantin, le vainqueur de Sarandaporo et
de Janina, le prince entre les mains de qui l'armée turque avait rendu
Salonique. L'Orient n'est jamais, on le voit, à court de surprises pour
l'observateur impartial. Il n'en est pas moins vrai qu'aux élections de 1915,
le cas de la Macédoine resta isolé, et qu'en dépit de la pression électorale
M. Gounaris fut battu à plate couture en Vieille Grèce.
     Cette Chambre venizeliste, nommée au printemps de 1915, fut
dissoute à nouveau en novembre de la même année. On sait que le roi
Constantin est le plus constitutionnel des souverains : il le montre en
ne se lassant pas de se servir des moyens que lui fournit la constitution.
Au moment fixé pour les élections la mobilisation avait eu lieu et les