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— 506 — Il est venu sans doute jusqu'à vous, mes chers confrères, que Lyon fut, un temps, il y a des ans et des ans de cela, un centre d'imprimerie d'une certaine importance. Horace Cardon, par exemple, n'est point pour vous un inconnu, tout au moins vous connaissez la roche à laquelle il a laissé son nom, cette Roche-Cardon où il y avait naguère, où il y a peut-être encore aujourd'hui toutes ces guinguettes. Guillaume Rouille non plus ne vous est pas tout à fait étranger ; seulement, je ne sais pourquoi vous appelez « place Rouville » la place qui lui a été dédiée, ce joli jardin où il y a des papillons jaunes enjonthlaspi et de beaux lézards habillés de Scutellaires. Peut-être même avez-vous entendu parler de Sébastien Gryphe.et aussi d'un certain Jean de Tournes : ces gens-là ne bâtissaient pas des têtes de lettres aussi élégantes que celles qui sortent de vos minerves, mais ils faisaient des livres bien plus beaux que les vôtres, c'est sûr, et que les miens aussi. Eh bien ! je ne suis pas certain du tout qu'aucun de ces grands ancê- tres, comme on dit, ait été un imprimeur aussi complet que fut Louis Perrin. On hésite toujours, en province, à Lyon surtout, vous le savez, à revendiquer contre la grand' ville une primauté, fût-elle cent fois prouvée. D'abord, personne ne veut vous croire, même à Paris, et c'est déjà bien ennuyeux ; après, on vous accuse de chauvinisme local : je ne sache rien de plus méprisable ; n'êtes-vous point aussi de cet avis ? Tout de même, il serait aisé de prouver que Louis Perrin, cet humble dont personne n'a parlé, fut, qu'on le veuille ou non — et pourquoi ne le voudrait-on pas ? — un très grand imprimeur, je suis tenté de dire « le plus grand imprimeur français du xixe siècle ». Mais j'ai grand tort, bonté, de parler ainsi, et je pourrais bien, ma foi, le regretter avant qu'il soit long- temps. Et pourtant, c'est vrai : Perrin a égalé Baskerville, Ibarra, Bodoni ; il a fait ce qu'ont fait à la fois Pierre Didot et son frère Firmin. Quand j'écris plus haut, Messieurs, en parlant de Perrin, « dont per-