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      Il est venu sans doute jusqu'à vous, mes chers confrères, que Lyon fut,
un temps, il y a des ans et des ans de cela, un centre d'imprimerie d'une
certaine importance. Horace Cardon, par exemple, n'est point pour vous un
inconnu, tout au moins vous connaissez la roche à laquelle il a laissé son
nom, cette Roche-Cardon où il y avait naguère, où il y a peut-être encore
aujourd'hui toutes ces guinguettes. Guillaume Rouille non plus ne vous est
pas tout à fait étranger ; seulement, je ne sais pourquoi vous appelez « place
Rouville » la place qui lui a été dédiée, ce joli jardin où il y a des papillons
jaunes enjonthlaspi et de beaux lézards habillés de Scutellaires.
     Peut-être même avez-vous entendu parler de Sébastien Gryphe.et aussi
d'un certain Jean de Tournes : ces gens-là ne bâtissaient pas des têtes de
lettres aussi élégantes que celles qui sortent de vos minerves, mais ils
faisaient des livres bien plus beaux que les vôtres, c'est sûr, et que les
miens aussi.

      Eh bien ! je ne suis pas certain du tout qu'aucun de ces grands ancê-
tres, comme on dit, ait été un imprimeur aussi complet que fut Louis
Perrin.
      On hésite toujours, en province, à Lyon surtout, vous le savez, à
revendiquer contre la grand' ville une primauté, fût-elle cent fois prouvée.
D'abord, personne ne veut vous croire, même à Paris, et c'est déjà bien
ennuyeux ; après, on vous accuse de chauvinisme local : je ne sache rien de
plus méprisable ; n'êtes-vous point aussi de cet avis ?
      Tout de même, il serait aisé de prouver que Louis Perrin, cet humble
dont personne n'a parlé, fut, qu'on le veuille ou non — et pourquoi ne le
voudrait-on pas ? — un très grand imprimeur, je suis tenté de dire « le plus
grand imprimeur français du xixe siècle ». Mais j'ai grand tort, bonté, de
parler ainsi, et je pourrais bien, ma foi, le regretter avant qu'il soit long-
temps. Et pourtant, c'est vrai : Perrin a égalé Baskerville, Ibarra, Bodoni ; il
a fait ce qu'ont fait à la fois Pierre Didot et son frère Firmin.
      Quand j'écris plus haut, Messieurs, en parlant de Perrin, « dont per-