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— 122 - NOTES SUR L'HISTOIRE DU SENTIMENT RELIGIEUX A LYON La vocation forcée d'Anne-Marie Pestallozi, religieuse à Saint-Pierre- les-Nonnains au xviw siècle. Dans les quelques notes que je voudrais de temps en temps glisser ici, mon dessein sera uniquement d'étudier ce que l'effort personnel où l'influence du milieu apportent de richesses nouvelles au sentiment reli- gieux, essayant de suivre cette méthode psychologique que Taine et Sainte-Beuve ont appliquée, avec tant de succès, et qu'à son tour utilise dans son Histoire littéraire du sentiment religieux M. l'abbé Brémond. Les documents sont rares pour mener une telle enquête. Les mys- tères qui se passent dans l'âme sont toujours difficiles, parfois même impos- sibles à noter par celui qui en est à la fois l'unique spectateur et l'heureux bénéficiaire. Puis, les papiers d'affaires, utiles à la défense des intérêts matériels, demeurent seuls, la plupart du temps, dans nos archives ; les lettres, les notes intimes, on les emporte avec soi et on les détruit par une sorte de pudeur instinctive. C'est donc leur caractère vraiment personnel qui donne aux feuilles que je voudrais analyser ici leur véritable valeur. Il s'agit de la requête présentée au promoteur de l'archevêque de Lyon, par Anne-Marie Pestallozi, religieuse à Saint-Pierre, pour obtenir la déclaration de la nullité de ses vœux. Elles nous permettront, ces pages, d'évoquer un incident, unique peut-être dans la vie de la grande abbaye lyonnaise aux dernières années de l'Ancien Régime. Le temps a passé où l'on ne voyait dans ces nombreux couvents, qui couvraient l'ancienne France, que des prisons déguisées pour les «fillesde maison ». Je ne crois pas qu'à la fin du xvme siècle le nombre des vocations forcées fut consi- dérable : la nostalgie du cloître qu'éprouvèrent les moniales chassées de leur abri par la Révolution ; les tentatives que firent beaucoup d'entre elles pour reprendre le genre de vie qu'elles avaient dû abandonner ; l'héroïque fidélité de certaines jusque sur l'échafaud, le prouvent. C'est à cette conclusion qu'étaient arrivés les Goncourt, à la fin de leurs études sur la société au xvme siècle.