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    502                     UN NOUVEAU GENRE

    imposer un surcroît de travail qui entraverait la marche du
    répertoire ! » — Grands mots, formule bannale dont se couvre
    le culte de la routine. Eh! de grâce, chers administrateurs,
    comptez donc un peu mieux avec les lois de la science moderne.
    Travaillez, je le veux, j'y applaudis ; mais choisissez un travail
    productif. Au lieu de monter, tant bien que mal, tant par an de
     lourdes et coûteuses machines, détaillez votre activité sur les
     mille petits chefs-d'œuvre qui gisent ignorés de la génération
     actuelle. Et puis, tenez, entre nous, la main sur la conscience,
     n'ètes-vous pas cent fois plus artistes qu'il ne vous plaît de le
     dire ? Allons, pas de fausse modestie, convenez-en. Si ce n'est
    pour l'art, en effet, par quel motif auriez-vous donc, cette année,
     employé les si précieuses forces de votre personnel à jouer
     devant les banquettes le Philtre, Haydée, et le Cheval de
     bronze !.. Franchement avouez qu'il y a mieux à faire ; avouez—
     vous le pouvez sans risque — que la marche du répertoire
     ne serait en rien plus onéreuse et pourrait devenir plus
     fructueuse, si, sans lui demander d'autres efforts, on l'engageait
     seulement dans une autre voie !
        Mais, il y a plus : le genre de travail que nécessitent ces repré-
     sentations est possible sans enrayer la préparation des opéras
     nouveaux. C'est à domicile que les solistes s'exerceraient ; entre
     artistes de mérite, comme ceux qui devraient être choisis pour
     figurer dans ces festivals hebdomadaires , un ou deux raccords
     suffiraient. D'ailleurs, c'est le propre et de cette musique et de
     ces auditeurs, de pouvoir se présenter, se représenter presque
     indéfiniment l'un à l'autre sans satiété ni fatigue. A chaque audi-
     tion nouvelle, l'exécution se perfectionne en même temps que l'en-
     thousiasme grandit; et il grandit sur la scène plus vite encore
     que dans la salle. Car je ne fais aucun doute que bientôt, même
     pour les artistes qu'il aurait d'abord effrayés, ce supplément de
     travail ne devienne, par ses résultats immédiats, un véritable plai-
     sir; que notre Luigini n'y transforme sans peine son nouveau
     bâton en bâton de maréchal ; et que l'intelligent directeur ne soit
     remercié par ses pensionnaires, d'avoir bien voulu consentir à
     leur laisser ainsi remplir sa caisse.




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