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                              TIC-TAC.                           491
Victorine portait que Claude Anselme hériterait du tout si Hen-
riette mourait avant d'être majeure. Cette clause, ajoutée à l'ins-
tigation d'Anselme, n'avait pas beaucoup préoccupé la malade.
Elle s'était à peine arrêtée à la possibilité de ce malhcar. Les
mères croiraient volontiers leurs enfants immortels. D'ailleurs,
elle était loin de soupçonner chez son mari aucune mauvaise in-
tention ; peut-être, au fait, n'en avait-il pas.


Du motif original qui détermina Claude Anselme à demander la
                   main de Sophie Collignon.

    Personne, avouons-le, n'est plus pressé de se marier qu'une
veuve, si ce n'est un veuf. L'herbe du cimetière n'avait pas germé
sur la tombe de Victorine que maître Anselme songea à reprendre
femme.
    Il jeta les yeux sur une petite paysanne à museau de fouine,
fille d'un fermier aisé avec lequel il avait des relations d'intérêt.
Le motif qui le détermina en cette occurrence eût éloigné le plus
grand nombre, si tant est que les honnêtes gens forment la ma-
jorité. Sophie Collignon menait la barque sous le toit paternel;
elle traitait tous les marchés, et Anselme avait remarqué chez
elle un talent particulier pour embrouiller les moindres comptes,
au point que lui-même, si madré qu'il fût, avait maintes fois
failli se laisser duper. Ses offres furent acceptées d'emblée.
Sophie, de son côté, n'avait jamais rencontré d'homme si diffi-
 cile à filouter, et, de celte honorable appréciation, était né un
 sentiment d'estime mutuelle bien flatteur pour tous les deux.
  A peine installée au moulin, dame Sophie prit en main la di-
rection du ménage. Anselme laissa faire; c'était le seul moyen
de vivre en paix, et, du reste, il trouvait que les choses allaient
parfaitement selon ses idées. Il ne s'occupa plus que de la grosse
besogne, ce qui permit de renvoyer un garçon meunier. Des vues
étroites, parcimonieuses, des mesures frisant l'indélicatesse, mais
aussi une véritable intelligence de l'économie domestique et
commerciale présidèrent à toutes les innovations de dame Sophie.