Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
486                          TIC-TAC.
grottes de Saint-Nazaire et son pont hardiment jeté sur un pré-
cipice. Tout en bas, la rivière apparaît, noire et polie comme un
marbre funéraire : c'est que la profondeur de l'eau est encore
plus grande que la hauteur visible des rives à pic. Sous l'abîme,
il y a le gouffre.
   Le vertige vous prend..... avançons. Saluez les ruines féodales
de Rochechinard : au bord des terrasses croulantes, l'ombre du
prince Zizim, le captif maure, s'incline parfois et l'écho alpestre
redit les chants mélancoliques de l'Orient. Cette église à côté
d'une masure, c'est la Motte-Fangeas. Le reste du village s'épar-
pille dans la campagne ; mais ici est la cure avec l'école commu-
nale; ici l'on apprend à vivre et l'on apprend à mourir. L'insti-
tuteur couche dans le clocher et peut sonner, sans quitter son
pauvre grabat, Y Angélus du matin.
    Si nous avions le temps, je vous proposerais de parcourir l'es-
pace tourmenté qui sépare le bassin de l'Isère du bassin de la
Drôme : Bouvantes, Saint-Jean, le Pont, les plateaux du Vercors.
On reviendrait par Ambel et les gorges d'Omblaizes. Là, j'ai vu
 des voyageurs, — retour de Suisse, — avoir de sincères étonne-
ments et trouver de nouvelles formules admiratives. Etes-vous
archéologue?... gravissez les sommets du Plan-de-Baix : là dor-
ment, sous les bruyères, les ruines inviolées d'une grande ville
romaine. Voiei le vieux château de Montrond, assis comme un nid
d'aigle sur la lèvre d'une ravine immense ; Vachères, qui appartint
 auxGrammont; les papeteries des Blacons, rivales d'Annonay;
 Aouste (Augusta Vocontiorum) et ses tourelles qui usent la faux
 du Temps ; Crest et son donjon énorme, fondé sur un banc d'huî-
 tres à 400 mètres au-dessus du niveau actuel de la mer; Livron,
 que Lesdiguières assiégea vainement, et les coteaux de silex où
 mûrit le brézême, un vin peu connu et qui n'en vaut pas moins.
 De Livron, le train express vous ramènerait en quelques heures
 à la gare de Perrache.
   Pour aujourd'hui, ce n'est point notre affaire. Il nous faut
brusquement tourner au nord et longer ce petit affluent de la
Bourne, lequel arrose un vallon ombragé de châtaigniers trapus
et de frênes élancés. L'air est tiède, juin étale au soleil son écrin