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JACQUES DE VINTIMILLE. 233 et qui parut en 1572. Ce poème intéresserait davan- tage, s'il était l'œuvre d'un témoin oculaire; mais quelle verve dans le prologue ! et comme le sentiment du triom- phe y fait vibrer l'âme de ce vieux gentilhomme, dont on voit bien que les anciennes blessures saignaient encore ! Cui grata est brevitas, satis, hostem dicere victum, est : Sed me amissa Rhodos non sinit esse brevem. Nam dulce est longos Turcis refricare dolores, Mergere bis victos, bis jugulare juvat. « Que celui qui aime la concision se contente de dire : « Nous avons vaincu f la perte de Rhodes ne me permet « pas, à moi,d'être si court. J'ai du plaisir à raviver l'amère « douleur des Turcs ; j'ai du plaisir à les submerger une « seconde fois et à les égorger de nouveau. » L'épilogue est un morceau plein d'originalité, et qui mérite d'être rapporté tout entier ; car dans aucun autre peut-être Vintimille n'a plus délicatement et plus poéti- quement exprimé le sentiment secret qui, malgré son âge., * ses fonctions et tant de nouveaux liens, le rappelait vers la riante patrie de ses jeunes années. Touchante coïnci- dence ! le même regret, la même espérance s'exhalera, longtemps après, des lèvres d'André Chénier, cet autre Gallo-Grec, aussi intéressant et non moins malheureux que Vintimille : Salut, Thrace, ma mère, et la mère d'Orphée ; Galata, que mes yeux désiraient dès longtemps, etc. Vintimille s'exprime ainsi : Nuper ab antiquis exsurgens Pallas Athenis, Vocibus hisvisa est imperiosa loqui : Puise Rhodo, et pelagi variis erepte periclis, Quid tantùm in Francûm finibus exul agis ?