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208                    LETTRE A M. MULSANT

ou pimpant comme une fauvette. Mais je m'arrête et vous
laisse parler, car vous discourez de ces infiniment petits
comme en eût discouru Bernardin de Saint-Pierre, notre
maître.
    « Quelques insectes destinés à n'avoir d'ailes à aucune
époque de leur vie ne sont sujets qu'à des mues et con-
servent ainsi jusqu'à la fin la figure qu'ils ont à leur
naissance. Mais tous les autres , outre les changements
de peau, éprouvent des transformations parfois si remar-
quables^u'on leur a donné le nom de métamorphoses.
Ils passent, au sortir de l'œuf, par trois états distincts,
c'est-à-dire se montrent sous la forme de larve, de nym-
phe et d'insecte parfait. En revêtant la dernière livrée,
l'insecte est encore dans un certain état de mollesse; ses
ailes sont chiffonnées et incapables de le soutenir dans
l'atmosphère, mais l'air en «'introduisant dans les tra-
 chées développe ces organes ; il dessèche ses téguments ;
 ceux-ci se parent peu à peu des couleurs qu'ils doivent
avoir, et bientôt l'animal est prêt à jouir des moments
les plus brillants de son existence. Ces moments ont en
général peu de durée. Il semble n'arriver à ce terme que
pour assurer le sort de ses descendants et perpétuer par
eux l'action qu'il exerçait dans l'économie de la nature.
Quand ce but est rempli, il ne tarde pas à périr (1). »
   Ainsi change, ainsi passe ce peuple innumérable; mais,
dans ce prompt changement, dans ce bref passage, il nous
laisse ou des témoignages d'affection ou des preuves de mal-
veillance. Si quelques-uns des siens, acharnés à notreperte,
rongent nos plantes, se font des magasins aux dépens de
nos greniers, se creusent des routes à travers nos étoffes,
s'attaquent à nos fruits et souvent à nos personnes, quel-

  (1) Cours élémentaire d'histoire naturelle, ZOOLOGIE, 1858, 276,