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90                POÉSIE.

     Nos enfants t'ont vue agnèle,
          Voilà deux ans,
     Poil frisé, corps blanc si frêle,
          Et pieds luisants,
       Jouer sur la prairie,
       Tomber sur tes genoux,
     • De ta tète aguerrie
       Bravant déjà les loups.
     Alors tu tétais ta mère,
          Puis vint ton tour
     D'être aussi ma nourricière,
          Et ton amour
       Me donne, avec ta laine,
       Tous les ans des agneaux ;
       Ils sont sevrés à peine,
       Que l'on vend les plus beaux.

     Quand tu rentres dans la crèclie,
          J'ai mis mon soin
     A t'offrir litière fraîche,
          Luzerne et foin.
       La veillée est chauffée
       Par ta douce chaleur,
       La lampe d'une fée
          Ajoute sa lueur.

     Travaillez, fuseaux, aiguilles ;
          Rouets, tournez !
     Grand'mères et vieilles filles
         Aux vœux bornés,
     De peur que ne grelotte
     L'enfant, chéri là-bas,
     Votre amour lui tricotte
       Une paire de bas.