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399 et sentant malgré lui une compassion qu'il dissimule et ré- prime devant les grandes et éternelles infortunes des damnés. Le coloris est assorti au lieu et à . la scène, et le dessin a fait l'admiration des connaisseurs. Nous avons entendu vanter les raccourcis des trois femmes accroupies comme bien mo- delés ; et le sentiment poétique qui reste de la vue de ce ta- bleau , est tel qu'il vous enlève la puissance de le raisonner. La tête de Yirgile par M. Scheffer était de nulle expression et mauvaise ; sous le pinceau de M. Flandrin , elle est deve- nue fort belle et d'une rare mélancolie. Espérons que M. Flan- drin fera les Lyonnais juges de ses progrès, et que son ta- bleau figurera à votre prochaine exposition. Que M. Flandrin travaille encore , qu'il y ait un peu moins de décousu et d'é- pars dans sa composition , et il fera aussi bien que M. Ingros. Après M. Flandrin, le peintre sérieux et poète-, M. Biard, le comique le plus naturel que nous connaissions. M. Biard a /exposé plusieurs tableaux : Les Banquistes dé- sappointés par le mauvais temps; la Garde nationale de cam- pagne défilant devant le maire; le Suisse d'église; un Pein- tre de portrait et le Branle-Bas. Ces trois premières toiles ont le mérite d'attirer la foule et de désopiler les rates pari- siennes ; c'est d'un effet mirifique ; on s'approche et l'on rit ; on se retourne , et l'on sent d'adroites mains se glissant dans les poches et changeant la jubilation en désappointement 3 3e plein en vide. Les foulards ont disparu, la tabatière en or de quelque maire de village , qui lui-même s'épanouis- sait devant le maire de village de M. Biard , et cherchait à se reconnaître , est absente pour toujours. C'est vraiment un succès scandaleux et allarmant pour la morale publique. Un poste de garde municipale devrait stationner à côté des œu- vres de M. Biard, afin que la sécurité pût se joindre à l'ad- miration , et que le plaisir ne fût pas si facilement troublé. C'est que vraiment les observations de M. Biard sont telle- ment fines et vraies, pleines d'un comique si naturel, et rendues avec tant de justesse , qu'on ne peut lui refuser de