Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                                $9
  les taches , ni faire des grimaces e»public. On le força dotfc
  à quitter le forum , à laisser libre le carrefour, car il y était
  un innocent sujet de rassemblement. A ceux qu'il avait fait
 si souvent, dans leur jeunesse , mourir de rire, il demanda
 de ne pas le laisser mourir de faim. Il ne put obtenir
 de l'autorité qu'un modeste espace sur la. petite place Lé-
 vis le, encore était-ce là une faveur, une exception faite à
J u i , à lui, le père Thomas. Mais ce cercle étroit ne pouvait
 lui suffire-. Il aima mieux le quitter que de rétrécir son talent
 à de si mesquines proportions, lui qui avait eu dans un
 temps la place Bellecour, que dis-je, les Brotteaux pour
 théâtre. Le découragement s'empara de son cœur, froissé de
 l'injustice des hommes, La. misère et son asthme ont fait le
 reste.
    Thomas mort, un médecin, un disciple de Gall, habitué
 à rire avec la mort, à lutter avec le choléra, a acheté ce corps,
l'a déshabillé de- sa peau, de sa chair, et n'a conservé de
lui que la charpente osseuse. Il a tâté ce crâne dans tous les
sens, et la bosse.mimique a été trouvée avec un grand dévea
loppement. L'amour des enfants y occupait aussi une large
place. Thomas n'a-t-il pas été ruiné , dépouillé par les siens
dans sa faible tendresse pour eux. Comment n'aurait-il pas
aimé l'enfance, lui, qui en était si aimé, lui qui en vivait
pour ainsi dire!
    Notre docteur, comme une dernière raillerie , a rendu à-
nolre artiste défunt son violon et sa pose. Thomas-Squelette
fait encore ainsi une dernière grimace, mais une grimace
effrayante à voir. Elle était autrefois un spectacle; aujour-
d'hui, c'est une leçon. Pauvre Thomas, te voilà devenu mo^
ralisle !
                                          Léon Borai».