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«8 faut-il être bête! Apportez une bouteille, et celui-là n'ira pas laver la table , soyez-en sûrs. Quelle sacrée bêtise d'aller se prendre aux cheveux pour... pour rien du tout, je parie. Il fit asseoir en face l'un de l'autre les deux champions, et les explications commencèrent entre eux. L'un , le bourgeois de César, était un homme court, solide , un ancien voltigeur dont la paix avait fait grossir le ventre ; l'autre un tonnelier aux larges épaules , dégagé, au bras nerveux , au poignet de fer. Le tonnelier se fit le raconteur ; c'était son droit : il avait été vainqueur dans la lutte. Le récit de cette querelle à peine apaisée, et qui avait jeté dans le cœur des deux héros une profonde irritation, fut fait brièvement > à grands traits, avec des expressions éuergiques. L'orateur, qui parlait avec pas- sion , déguisait mal la joie de son triomphe ; son adversaire , pour qui chaque mot était un nouveau coup de poing, écouta d'abord avec rage , puis il répondit avec aigreur, avec iro- nie ; il se mit à racontera son tour, et, au moment où César croyant avoir réussi à les raccommoder, savourait une douce satisfaction dans un cinquième verre de bon vin du Beaujo- lais, une main ouverte tomba sur la joue du narrateur à qui ça coupa la parole. Le peintre se leva avec dignité , il était ou- tré ; l'offense avait été publique ; les deux adversaires se souvenaient d'avoir été soldats , un duel fut arrêté à l'ins- tant même. — A quand le combat ? — Atout de suite. — Marchons. On se battra au pistolet. L'artiste fut choisi pour l'un des témoins. Messieurs, dit-il, je vous préviens que si vous n'avez pas la ferme intention de vous battre , il ne faut pas aller sur le [ terrain, parce qu'une fois là il n'y aura plus d'arrangement possible. Ni l'un ni l'autre n'avaient envie de s'arranger. i Le cabaretier chez qui l'on buvait avait, dans un placard au premier, une paire de pistolets de dragons. Je n'entends