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34 était premier violon et chef d'orchestre ; son frère,plus calme, moins inflammable, dirigeait les seconds. En peu de temps notre troupe d'amateurs se forma, et nous nous habituâmes à comprendre cette musique d'ensemble, seule véritable inter- prète des passions. La progression s'opérait; notre orches- tre grandissait à mesure que nous devenions plus expérimen- t é s , et une direction plus forte devint nécessaire. Nous avions commencé par l'ouverture du Maçon, nous en étions à celle de Fidélio et du Comte d'Egmont. Alors Baumann, cet artiste si bon, si modeste et d'une si riche nature musicale, Baumann, que nous aimons tous, vint prendre place par- mi nous et imprimer un nouvel essor à notre marche. Les symphonies de Beethoven commencèrent à nous devenir fa- milières , et nous nous initiâmes à cette profonde école alle- mande, notre maîtresse en luxe d'instrumentation et en science d'effets harmoniques. Cependant le salon des deux frères était devenu trop étroit pour contenir le personnel de notre armée exécutante ; l'har- monie , q u i , dès l'abord n'était nullement représentée, s'était infiltrée peu à peu et tendait à compléter ses parties ; chacun sentait le désir d'une exécution plus complète et plus gran- diose. Le noyau était formé. Chaque solennité musicale, cha- que passage d'artiste nous retrouvait sous la direction de notre chef d'orchestre, exécutant publiquement les mor- ceaux chéris de nos études particulières. Un concert était une vraie fête où chacun était à son poste; notre troupe, un orchestre toujours complaisant et toujours prêt à sa- tisfaire aux exigences d e l'art. H nous fallut donc changer de local. Un de nous, libre de son temps, aimé de tous, doué d'une organisation mu- sicale peu commune et d'une volonté profonde pour tout ce qui se rattachait aux beaux-arts, quels qu'ils fussent, l'un de nous se chargea de nous réunir, et nous recommençâmes dans son salon les symphonies de Beethoven, que nous n'avions fait qu'ébaucher jusqu'alors. Une artiste distinguée,