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  était premier violon et chef d'orchestre ; son frère,plus calme,
  moins inflammable, dirigeait les seconds. En peu de temps
  notre troupe d'amateurs se forma, et nous nous habituâmes
 à comprendre cette musique d'ensemble, seule véritable inter-
 prète des passions. La progression s'opérait; notre orches-
 tre grandissait à mesure que nous devenions plus expérimen-
 t é s , et une direction plus forte devint nécessaire. Nous
 avions commencé par l'ouverture du Maçon, nous en étions
 à celle de Fidélio et du Comte d'Egmont. Alors Baumann, cet
 artiste si bon, si modeste et d'une si riche nature musicale,
Baumann, que nous aimons tous, vint prendre place par-
 mi nous et imprimer un nouvel essor à notre marche. Les
 symphonies de Beethoven commencèrent à nous devenir fa-
 milières , et nous nous initiâmes à cette profonde école alle-
mande, notre maîtresse en luxe d'instrumentation et en science
d'effets harmoniques.
     Cependant le salon des deux frères était devenu trop étroit
pour contenir le personnel de notre armée exécutante ; l'har-
monie , q u i , dès l'abord n'était nullement représentée, s'était
infiltrée peu à peu et tendait à compléter ses parties ; chacun
sentait le désir d'une exécution plus complète et plus gran-
diose. Le noyau était formé. Chaque solennité musicale, cha-
que passage d'artiste nous retrouvait sous la direction de
notre chef d'orchestre, exécutant publiquement les mor-
ceaux chéris de nos études particulières. Un concert était
une vraie fête où chacun était à son poste; notre troupe,
un orchestre toujours complaisant et toujours prêt à sa-
tisfaire aux exigences d e l'art.
    H nous fallut donc changer de local. Un de nous, libre
de son temps, aimé de tous, doué d'une organisation mu-
sicale peu commune et d'une volonté profonde pour tout ce
qui se rattachait aux beaux-arts, quels qu'ils fussent, l'un de
nous se chargea de nous réunir, et nous recommençâmes
dans son salon les symphonies de Beethoven, que nous
n'avions fait qu'ébaucher jusqu'alors. Une artiste distinguée,