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Oh ! sainte liberté , sur ta lèvre , en tes yeux,
Que l'avenir sourit puissant et glorieux !
Vous ne savez donc pas, guerriers, comme elle est belle ?
Osez la contempler... et vous mourrez pour elle ! ».
Ainsi parlait Melcthal ; ainsi ferme et sans peur,
Une main sur son glaive et l'autre sur son cœur ,
L'ardent vieillard, du haut de la pierre héroïque,
Confiait à la nuit son courroux prophétique.

Soudain un bruit immense à grondé dans les airs ;
Il roule et des bergers vient troubler les concerts :
La foudre, voix du Dieu qu'outrageait leur délire ,
Répondait à son tour aux accents de la lyre...
Et Gésier s'est levé... Morne et silencieux,
Il pâlit... Le tyran se souvenait des cieux.
Et tandis qu'il fuyait comme le daim timide,
Que presse au flanc des monts la'louve au pied rapide,
L'orage aux mille voix , sur ses pas ameuté',
Semblait loi répéter : « Vengeance ! Liberté ! »
Liberté !     Cependant nne frêle nacelle
Apparut sur les flots qui rugissaient sous elle.
Ils étaient deux : l'éclair illaminait leurs fronts,
Et Melcthal s'écria : « Courage, compagnons !
« Ce n'est pas contre vous que s'arme la tempête,
            « Ministre d'un ciel irrité...
 « Courage !... C'est ici qu'un grand destin s'apprête,
« Et chaque flot vous pousse à l'immortalité ! »
     Melcthal se tut : la nef agile et fière,
Touchait au bord sacré d'où naquit la lumière.
Et la main dans la main , enlacés, tous les trois ,
A genoux, aussitôt tombèrent à la fois.
0 Grutly ! plus heureux qu'en ces jours où nous sommes,
Tu trésaillis alors, fier de porter des hommes !
Et quand aux cieux monta le pacte solennel
Qui fil la Suisse libre et te lit immortel,
Le lac se revêtant d'un silence sublime,
Sembla te saluer , ô trio magnanime !
Et la reine des nuits, l'inondant de clarté,
Te ceignit d'une immense et sombre majesté !...

                                   Georges AKANOAS.