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roi en fut si profondément affligé , si l'on croit quelques au-
teurs, qu'on craignit pour la tête du faible monarque. D'au-
t r e s , et ceux-là le supposeraient plus faible e n c o r e , disent
que l'amour du plaisir fit promptement oublier le chagrin.
Toujours est-il qu'Ã Lyon il se fit encore des jeux et des tour-
nois auxquels il assistait régulièrement, et il « disoit que ce
qu'il en faisoit, estoit pour resiouyr la royne. » Mais, ou l'é-
poux se trompait dans ce calcul, ou l'ami du plaisir dissimu-
lait ; car il est des afflictions que n'endorment point les jeux ,
les ris , les joies bruyantes ; ces profondes angoisses du cœur
maternel s u r t o u t , la religion seule les repose et les adoucit.
Anne aussi bien « laissoit le plus souvent le passe-temps des
j o u t e s , pour s'aller consoler auprès du bon Père F . Jean
Bourgeois. »
Dans une autre circonstance, Anne de Bretagne reparaît
avec son nouvel époux à Lyon. C'était en 1507 ; et Louis XII,
accompagné de sa Bretonne , ainsi nommait-il la r e i n e , vint
aussi visiter, comme r o i , l'Observance à la fondation d e l à -
quelle il avait assisté, duc d'Orléans.
Trois ans a p r è s , Louis séjournant encore dans nos m u r s ,
u n de ses plus dignes favoris , un grand cardinal, un légat
du saint-siége, George d'Amboise, archevêque de Rouen ,
mourut aux Célestins , le 25 mai 1510. Peu d'heures avant sa
m o r t , il disait au religieux qui l'assistait.: « Frère Jean , que
n'ai-je été toute ma vie Frère Jean ? » Il avait raison; rien n'aide
tant à mourir qu'une vie de silence et de prière. On lui
fit des obsèques dignes de son rang , de ses hautes qualités ,
de son immense fortune, dignes surtout de l'affection dont
l'honorait un roi qui fut l'idole de son peuple. Le Consulat y
fit porter trois douzaines de torches avec les armes de la
ville, et accompagna tout entier le convoi. Le roi lui-même
honora de sa présence le service funèbre , qui fut célébré
aux Célestins, où fut conservé le cœur du grand cardinal. De
\ à le somptueux cortège accompagna le corps du défunt jus-
qu'à l'Observance , où il fut déposé pour quelques jours. Un