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2ii0 mais avec un peu de bienveillance , de zèle et d'argent, elle p e u t renaître et recouvrer son antique splendeur. D'ailleurs , l'homme qui réfléchit, le chrétien , l'ami des arts ne trouvent-ils pas un charme inexprimable à ces débris d'église ou de monastère? Si l'intérêt d'une ruine augmente à proportion du sentiment moral qui s'y r a t t a c h e , il y a là vraiment quelque chose de plus p u r , de plus i n t i m e , de plus mélancolique , de plus pieux qu'aux restes des donjons , des manoirs ou des forts. Les uns et les autres rejettent nos pensées vers des temps qui ne sont plus. La scène vide et morte en apparence , la mémoire la repeuple , l'imagina- tion la vivifie, o u i ; mais ces donjons, ces m a n o i r s , ces forts ne rappellent aux esprits ardents que des m a l h e u r s , des combats , des tyrannies , des chaînes ; aux esprits froids, que luttes d'hommes ou de partis , que misères dorées , que voluptés sans bonheur comme sans lendemain : courte ivresse de gloire ou de plaisir, parmi de longs jours de deuil et de sang ! Au contraire , la vue des sanctuaires ne laisse planer que des souvenirs purs sur toutes ces heures marquées , durant des siècles , par la cloche du beffroi. Là , l'œil de Dieu et son cœur étaient ouverts aux supplications de ses enfants ; l'hostie pacifique était immolée sur cet autel , dont quelques pierres crient sous nos pas ; voici la chaire où le ministre de Dieu évangélisait la religion de foi et d'amour; ici, la place des tribunaux sacrés ; l à , du m o i n s , si quelques pleurs ont coulé, ils furent sans amertume : le repentir n'a-t-il pas ses douceurs secrètes, comme l'innocence a ses joies ? A côté , dans ces nefs étroites et sombres , vo'ilà des tombeaux. Mais ceux qui dorment sous la pierre du temple , ce sont des vieillards blanchis aux labeurs de la vie monastique , ou de pieux chrétiens dont la religion a fermé les yeux. Tous ces aspects intéressent, attendrissent l'âme oppressée de souve- n i r s ; autour de v o u s , le silence mémo de ces voûtes, autre- fois retentissantes , vient ajouter quelque chose de grave et de solennel à ces sanctuaires, dépouillés de Dieu p o u r t a n t , et