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127 Adieu, charme de mes beaux jours ! Saturne interdit nos amours, Nous nous en tiendrons à l'estime. 11 parlait ainsi. Vaine promesse ! Bientôt il en revenait à ses premières amours ; il rimait malgré Saturne., et les Muses étonnées méconnaissaient leur ancien favori. Sans doute , Messieurs, nous devons regretter, nous de- vons plaindre le talent qui s'efface et s'oublie. Mais, après la mort, faut-il être encore la proie de ces attaques obscures et viles auxquelles on se montra beaucoup trop sensible pen- dant sa vie ? Il n'y a que des gens dépourvus de toute politesse de l'esprit et du cœur qui puissent, sans rougir, insulter, au fond de la tombe, un homme, de bien qui jamais n'in- sulta personne, qui fut doué des facultés de l'imagination dont ces présomptueux ignorants ne soupçonnent pas l'exis- tence , qui remplit parmi les gens de lettres une place dis- tinguée , et qui laisse de beaux exemples à suivre comme les plus honorables souvenirs. Ainsi que chez tant de peintres célèbres, il y a deux époques dans le talent de M. Bérenger. Il faut le juger sur les vers de son bon temps! Là , vous trouverez de la ver- ve , de l'harmonie, de l'élégance, une douce et-sage phi- losophie , la touche des Laharpe, des Marmontel, des Florianetdes Colardeau (1) -, car ces auteurs n'auraient point (1) Le talent poétique de M. Bérenger avait aussi quelque rapport avec celui d'Imbert, auquel, à l'âge de 26 ans, il adressa une épitre en vers , insérée dans l'Almanack des Muses de 1776. M. Imbert y répondit de la ma- nière suivante : Que votre Apollon gracieux Sait avec art débiter sa fleurette ! Pour l'amour-propre d'un poète Son doux parler est bien insidieux ! Su premier des humains, quand l'épouse nouvelle Mordit à cette pomme indigeste pour nous , he séducteur, sans doute, en haranguant la belle,