Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                                       — 438 —




      Par l'énumération faite plus haut des membres de la société, par la liste de
leurs invités — gens d'esprit et de talent qui payaient leur écot en rimes ou en bons
mots — on juge de la bonne, simple et franche gaieté qui devait régner dans les
réunions du cénacle.
      Les fidèles de ces agapes, les « boute-en-train » étaient Bonnefond, Genod,
Dardel, Trimolet, Boitel surtout, ainsi qu'en témoigne un feuilleton du Journal
du Commerce " intitulé «Souper d'artistes». Chaque convive chantait sa chanson,
débitait des vers ou de la prose de sa façon. Reverchon disait à ravir les fables
de La Fontaine ; Maniquet était irrésistiblement comique dans ses complaintes sur
le Désert, l'ensevelissement du puisatier Dufavet, l'affaire Marie Robin et dans son
fameux Voyage en Ailes-Vessie. Les peintres répétaient les « scies » de leur atelier ;
les musiciens venaient avec leur instrument ; Brosse, Barioz, Dubouret, Jansenne
ou Renard chantaient. Et, dans les accalmies, de Laprade, Paul Chenavard, Jean
Tisseur étaient les merveilleux causeurs que l'on sait.
      En bons Lyonnais, les Bonnets de coton possédaient leur théâtre de Guignol
et, sans doute, de superbes décors. Les acteurs de ce théâtre jouèrent devant Hostein,
et Levassor assista, chez Auray, le 7 mars 1845, à la « première représentation de
la nouvelle troupe du sieur Guignol » donnée avec les poupées de Rousset.
      Plus tard — vers 1850 i — avant Lemercier de Neuville, des pupazzi défilèrent
et discoururent sur la petite scène, grâce au peintre Laurasse qui avait eu la patience
et le talent de modeler ou de sculpter les têtes de Bonnefond, de Boitel, de Rever-
chon, de Fonville, de Trimolet, de Maniquet, et maints autres masques connus.
Pour « la grande inauguration des Marionnettes Intelllligentes », Alexis Rousset
avait rimé un joyeux « prospectus ».
      Parfois encore, on organisait une loterie. Au bas d'une convocation pour le
jeudi 24 janvier (1850), chez Auray, on lit cet ordre du jour, de la main de Boitel :
« Election d'un membre. Loterie d'objets d'art ; prière d'apporter des lots. Guignol
sera des nôtres ».                   .

                                           s
     Les strophes, contes, chansons ou complaintes que Boitel et Rousset nous
ont conservés ne sont pas faits, sans doute, pour accroître le renom poétique de
notre cité. Son histoire littéraire ne retiendra ni les vers de Boitel, ni les procès-ver-
baux de Genod, ni son Origine des vents ; pas plus que Fi des cheveux ! du docteur
René Morel, ou les Gouttes de son confrère Passot. C'étaient là des couplets après
boire, rimes en hâte, tant bien que mal, et destinés seulement à amuser des amis.