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— 240 — La Patrie? Ah! vivants, sans doute encore était-ce au chevet de Paris l'astre qui scintilla, quand — Sainte Geneviève ! — en les nuits d'Attila ta lampe veillait sur Lutèce ! Flamme éteinte! — et parfum défunt aussi : pollen des fleurs qui nous haussaient de l'instinct à l'Idée : colzas alsaciens, bruyères de Vendée, houblonnières de Reischoffen ! C'est le sang promu vin de notre vrai vignoble ; c'est à jamais Roland sonnant de l'olifant ; et, noblesse obligeant, c'est en France l'enfant qui depuis dix siècles naît noble. C'est dans le sombre azur, plus haut que nos beffrois, frôlant d'ombre nos blés, nos orges et nos seigles, et plus haut que Reims, l'aire, où s'échappaient les aigles de la Maison de France, ô rois ! Tous les oiseaux français ayant quitté leur branche pour porter, en narguant la Prusse et ses guetteurs, l'annonce au Rhin français, — sublimes migrateurs ! — du jour levé de la Revanche ! Oiseaux fonçant vers l'Est, oiseaux porte-bonheur, « Oiseaux venus de France » : hirondelles naguère, avions à présent, alérions de guerre, libellules des champs d'honneur ! C'est tout ce qui périt et reste impérissable, Vase encore embaumé qu'ont quitté ses parfums... Oui, c'est tout ce qui dure, ô cendre des défunts, Quand on bâtit sur votre sable. Paul ROUGIER.