page suivante »
— 211 — LE PREMIER CONFLIT ENTRE FESCH ET CONSALVI L'AFFAIRE V E R N È G U E S (i) Sur la fin de l'année 1803, un peu moins de quatre mois après sa prise de possession de l'ambassade française près du Saint-Siège, le cardinal Joseph Fesch eut à entamer et à conduire une négociation aussi épineuse que délicate ; d'après un avis confidentiel d'Alquier, ministre à Naples, et sur des ordres venus de Paris, il demanda au gouvernement pontifical l'extradition d'un émigré, Joseph de Vernègues, agent des Bourbons, se déclarant naturalisé sujet russe, accusé d'une conspiration contre le premier consul, mais plutôt sur des inductions que sur des preuves positives. Ce fut pour le diplomate improvisé l'occasion de dé- ployer ce que son caractère avait de ténacité naturelle, son amour-propre de vaine exagération dans son ascendant personnel. Malheureusement, ce coup d'essai ne fut jugé par aucun témoin comme un coup de maître. La plupart des historiens ont inutilement cherché quels motifs spéciaux ou quelle influence pressante avaient incliné Bonaparte à désigner son oncle comme le successeur d'un homme tel que François Cacault, jouissant auprès de Pie VII de la plus entière confiance, dont la sagesse, la mesure, l'intelligence, avaient conquis l'universelle sympathie de la curie romaine. Ce choix, aussi inopportun que peu prévu, fut-il déterminé par la parenté, par le désir d'accorder au frère de Madame Mère une faveur enviée ? Fut-il sollicité plus ou moins indirectement par un prélat de fraîche origine, avide d'accumuler les dignités sur ses épaules, trop peu soucieux du poids de son vaste diocèse, dont il s'éloignera au milieu des innombrables embarras d'une première organisation ? Ou bien eut-on l'intention de renouer les traditions du régime monarchique, qui confiait volontiers à ses nationaux du Sacré-Collège, aux d'Estrées, aux Polignac, aux Tencin, aux Bernis, la mission de le représenter au Vatican ? On (1) Les notes sont placées à la fin de chaque article.