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— 208 — UNE CAGE AUX LIONS A LYON Berne a sa fosse aux ours ; combien visités, combien choyés ces lourds animaux, chacun le sait. Pourquoi notre ville n'aurait-elle pas, elle aussi, sa cage aux lions ? Cette façon d'armes parlantes ne manquerait pas de charme assurément et, peut-être, attirerait-elle encore plus de monde à la foire ! ' L'idée en fut suggérée à nos pères, il y a trois cents ans, mais elle se heurta au sens éminemment pratique de nos concitoyens. En 1585, M. de Mandelot, le célèbre gouverneur du Lyonnais, dont la maison existe toujours, montée Saint-Barthélémy, et dont la tombe se voit encore à Saint-Jean, dans la chapelle de la Vierge, « désirant honorer et gratifier cette ville qui, avec le nom, porte les armoiries d'un lyon », avait imaginé de lui offrir « un jeune lyonceau, grand à merveille selon son temps, lequel il a voué à ladite ville aux fins que, à l'instar d'autres qui ont pour armoiries de semblables animaux, elle le nourrît en quelque lieu séparé, comme lui-même l'a fait nourrir en sa maison depuis quelque temps ». Mandelot attendait, sans doute, pour faire cette surprise au Consulat, que l'animal fût dans toute sa valeur. Mais, ô fatale rencontre! le roi « lui a fait entendre qu'il serait bien tost en cette ville et qu'il entendait et voulait loger en sa dite maison ». Que faire en cette occurrence? C'était évidemment trop de deux hôtes pareils dans son hôtel et, bien qu'il fût le roi des animaux, « il fallait, par nécessité, que cet animal en fût sorti, et de bonne heure, parce qu'on espérait que Sa Majesté — le roi de France — serait ici sur le commencement du prochain mois d'aoust ». En hâte, le gouverneur mande en son hôtel « noble homme Antoine Scarron, consul eschevin de ladite ville » pour l'aviser de son dessein, > lui dire son embarras et lui donner charge d'y pourvoir promptemsnt : « Prenez mon lion, lui dit-il, et tâchez de l'installer au plus tôt ». Messire François de Mandelot ne doutait évidemment pas que ses administrés ne fussent très flattés de cette offre gracieuse. Il n'était pas